Biennale d’architecture de Venise : penser « l’après »

Biennale d’architecture de Venise : penser « l’après »

À partir du 22 mai prochain se tiendra la 17e édition de la Biennale d’architecture de Venise. Le thème retenu cette année par son commissaire d’exposition Hashim Sarkis — How will we live together ? (Comment vivrons-nous ensemble ?) — cristallise sans doute ce que la société contemporaine contient d’attentes et d’espoirs, mais aussi de doutes et de craintes.

La montée de l’individualisme et des replis identitaires, la confiscation des communs, l’imminence du désastre écologique, comme les alternatives concrètes à cette marchée forcée dans laquelle nous sommes pris, commandent la formulation d’un « nouveau contrat spatial », estime Hashim Sarkis. Comment construire des espaces partagés, et redonner une pertinence et une profondeur à l’activité démocratique ? Comment faire apparaître des solutions possibles quand, pour reprendre une formule attribuée à Fredric Jameson, il est plus facile d’imaginer la fin du monde que celle du capitalisme ? Enfin, quel rôle l’architecte est-il appelé à jouer dans cette entreprise ? On ne peut que saluer l’actualité de ces questions, et l’aptitude de Sarkis à les inscrire dans des problématiques plus anciennes.

La France sera représentée par l’architecte Christophe Hutin qui, depuis son immersion dans le township de Soweto en 1994, n’a eu de cesse d’inscrire les communautés au cœur de son œuvre architecturale. Fort d’une conception qui a profondément intégré l’impact du facteur humain sur l’environnement, Hutin nous rappelle que, comme la planète, « les situations d’architecture [sont] des écosystèmes fragiles ». Il incite à renoncer à un regard vertical et hiérarchisé pour intégrer l’expérience, le plaisir, le confort et la créativité des habitants dans les projets à venir, donnant tout sens au thème de cette année, que Sarkis a eu l’intelligence de conjuguer au pluriel (Comment vivrons-nous ensemble ?).

La Strada enverra sur place deux correspondants, l’architecte Maria-Theresa Parfait et le philosophe Bertrand Cochard, qui livreront le produit de leurs regards croisés dans un article à paraître dans notre rubrique Économie de la culture.

Bertrand Cochard : Ancien élève de l’École Normale Supérieure de Lyon, agrégé et docteur en philosophie. Il a consacré son travail de thèse à Guy Debord, à paraître aux éditions Hermann sous le titre Guy Debord et la philosophie.
Maria-Theresa Parfait : Issue d’une famille d’architectes, Maria-Theresa a quitté son Brésil natal pour rejoindre l’École d’Architecture et de Paysage de Bordeaux, puis a complété son Master par une spécialisation en nouvelles formes d’habitat en Allemagne. Elle a fondé à Monaco l’Atelier Parfait en 2009. Aujourd’hui implanté à Nice, il veut donner plus de place à l’architecture de bois et de terre crue.