Chefs-d’oeuvre de LUX(e) à voir gratuitement

Chefs-d’oeuvre de LUX(e) à voir gratuitement

La Cinémathèque de Nice participe une nouvelle fois à une initiative autour du cinéma : la création du prix LUX du public. Trois films, trois univers et trois ambiances, mais un gage de qualité exceptionnelle pour cette 1e édition des LUX Film Days. À déguster, en attendant la réouverture des salles obscures le 19 mai !

On commence à s’y faire. Voire à aimer ça. Chaque semaine, un cinéma, une association ou un comité lance sa plateforme de visionnage en ligne. Des œuvres souvent qualitatives et triées sur le volet. Le Parlement européen et l’European Film Academy ne dérogent pas à la règle. Eux se sont associés pour créer un nouveau prix : le prix Lux du public. En clair, trois films à visionner gratuitement en ligne – sur le site de la Cinémathèque de Nice par exemple – et à noter vous-même. Et ça se passe du 3 au 23 mai, alors même que la réouverture partielle des salles est prévue pour le 19. La cinémathèque se tient-elle prête à parer à un nouveau camouflet du gouvernement ? On en doute. On pense plutôt qu’ils ont eux aussi commencer à s’y faire et à aimer ça. En même temps, un prix mettant en compétition trois films déjà sortis dans les salles (pas spécialement française), c’est l’assurance du choix et de la qualité. Du fin fond de la Pologne aux tréfonds de l’administration roumaine, cette sélection met en avant le cinéma européen de l’Est et du Nord. Des films qui ont ravi la critique outre-Atlantique, au point d’être nominés aux Oscars, voire même de gagner un prix pour l’un d’entre eux. Bref, l’occasion de raviver la flamme du « bon film » avant de retourner débattre à la sortie des salles.

Drunk, à voir pendant une grosse gueule de bois

Qui a dit que l’alcool était mauvais pour la santé ? C’est en tout cas le postulat de départ des quatre personnages principaux de Drunk, film danois de Thomas Vinterberg. Martin, Tommy, Nikolaj et Peter, amis de longue date dans la cinquantaine et professeurs désabusés dans un lycée, se lancent dans une expérience pour le moins saugrenue : vivre avec un léger taux d’alcool constant dans le sang. Ils s’appuient pour cela sur l’étude d’un chercheur norvégien qui clame que l’être humain naît avec un déficit de 0.05% dans le sang. Remédier à ce manque permettrait selon lui d’améliorer ses performances professionnelles, sociales et son bien-être. Une ivresse légère ouvrirait l’esprit, atténuerait les difficultés et stimulerait la créativité. Et les premiers résultats sont bluffants : les quatre compères se sentent revivre et poussent l’expérience au niveau de l’étude universitaire. Mais ils seront vite rattrapés par la gueule de bois et leurs situations, familiales comme professionnelles, dérapent. Loin de faire l’apologie de la consommation d’alcool, Thomas Vinterberg interroge surtout le spectateur sur le mal-être de l’être humain et l’incapacité à être en accord avec soi-même. Tout ça porté avec brio par ses acteurs fétiches, Thomas Bo Larsen, Magnus Millang, Lars Ranthe et surtout le génial Mads Mikkelsen. Et le film est plébiscité par la critique : en 2021, il a reçu haut la main l’Oscar du meilleur film international, le BAFTA du meilleur film en langue étrangère et le César du meilleur film étranger. Rien que ça. Si cela ne vous suffit pas pour le regarder, dites-vous que l’expérience est géniale. En tout cas, nous, on adore. Au point de tenter l’expérience dans la rédac’ sous forme d’un gonzo ? Affaire à suivre…

L’Affaire Collective, pour les futurs journalistes d’investigation

Souvenez-vous en 2015 : un incendie se déclare dans une boîte de nuit à Bucarest et fait 27 morts et 180 blessés. Enfin, souvenez-vous… Vous n’en avez sûrement jamais entendu parler. La loi de proximité dans la presse, on en reparlera… Il n’empêche : cet incident fait un tapage dans le pays où une foutue bête du Liechtenstein vient d’abattre le plus grand prince des Carpates. Surtout que dans les jours qui suivent, d’autres morts s’ajoutent à la liste. Ceux qui étaient blessés, brûlés vifs et censés être en sécurité à l’hôpital. Comment cela est-il possible ? Un médecin alerte alors une équipe de journalistes d’investigation qui révéleront un à un les scandales d’un monde hospitalier corrompu jusqu’à la moelle. Le thème de ce film ne serait être plus d’actualité. Ce film qui est d’ailleurs un documentaire et qui nous plonge au cœur d’une enquête journalistique. L’Affaire Collective est construit à la manière d’un thriller, le réalisateur, Alexandre Nanau, maniant les codes de genres à merveille. À travers le regard des victimes qui tentent de se reconstruire et de celui d’un ministre de la Santé fraîchement nommé qui tente de son côté de réformer le système, le documentaire porte une analyse extrêmement instructive. Services secrets, accidents de voiture suspects, arrestations et manifestations, il y a de tout, dans un film intense et palpitant. Nommé aux Oscars du meilleur film international et battu de justesse par… Drunk.

La Communion, l’un n’empêche pas l’autre

Troisième et dernier film de la sélection pour le prix LUX du public et non des moindres : La Communion, de Jan Komasa. Inspiré de faits réels, il narre l’histoire d’un jeune délinquant polonais de 20 ans qui rêve de devenir prêtre. Mais son casier judiciaire l’empêche d’être celui qu’il souhaite. Alors qu’il est interné, il est envoyé pour travailler dans une menuiserie d’une petite ville du fin fond de la Pologne. Il va alors berner tout le monde en se faisant passer pour un religieux et prendre la tête de la paroisse, l’actuel prêtre partant à la retraite. La petite communauté va rapidement tomber sous le charme de ce nouveau prêcheur, incarné par un Bartosz Bielenia qui crève l’écran de ses yeux bleus perçants. Mais il se rendra compte que cette petite ville sans histoire cache en fait un très lourd secret. Petit à petit, il va s’empêtrer dans ses propres mensonges au fur et à mesure de l’expiation qu’il a entreprise avec les gens de sa paroisse. Le film interroge aussi les individus vivant en communauté. Pourquoi se rassemblent-ils ? Pourquoi créent-ils des divisions ? Des questions soulevées par un long-métrage lui aussi nommé à l’Oscar du meilleur film international, cette fois-ci en 2020, et battu, s’il vous plaît, par Parasite, de Bong Joon-ho. À croire qu’il s’agit du fil conducteur de la sélection.