Un marchand d’art à New York

Un marchand d’art à New York

En consacrant une grande exposition à Pierre Matisse, le Musée Matisse revient sur le parcours exceptionnel du plus jeune fils d’Henri Matisse, marchand d’art à New York et figure incontournable du monde de l’art moderne. Décidément, cette institution niçois présente des événements d’envergure mondiale qui, s’ils font rayonner la ville, permettent aussi de découvrir les fondements de l’art contemporain et son histoire.

Pendant près de 60 ans, la Pierre Matisse Gallery a joué un rôle considérable pour la défense de l’art moderne français et européen aux États-Unis, durant une période qui a façonné les grandes collections américaines privées et institutionnelles. À travers plus de 300 expositions, c’est toute une génération d’artistes européens qui a ainsi pu exister sur la scène new-yorkaise et contribuer à son dynamisme. Pierre Matisse s’est employé à construire des notoriétés et à valoriser les carrières américaines des grandes figures de la galerie que furent Henri Matisse, Joan Miró, Alexander Calder, Balthus, Alberto Giacometti, Jean Dubuffet et Marc Chagall, pour ne citer que les principaux. Son action visait plus à défendre des singularités qu’à soutenir des courants, qu’ils portent le nom de fauvisme, de cubisme ou de surréalisme, ou encore d’École de Paris.

Sans prétendre à l’exhaustivité, l’exposition Pierre Matisse, un marchand d’art à New York retrace cette odyssée à travers près de 70 oeuvres de 23 artistes essentiels de la galerie. Comme le dit Balthus, « il voyait les choses comme le fils d’un peintre« . Pierre Matisse ne vendait pas les oeuvres à n’importe qui, il se souciait de leur devenir avant de les céder. Le parcours accorde une place importante aux catalogues de la galerie qui font montre du génie de Pierre Matisse pour ces publications, parfois modestes, mais toujours inventives. Il dévoile aussi la minutie et l’audace dont il faisait preuve pour les accrochages ; en témoignent les nombreuses photographies de ses expositions.

Et n’oublions pas l’importance du lien entre Pierre et son père qui aidèrent nombre d’artistes à survivre pendant la 2e Guerre Mondiale, vendant leurs oeuvres pour leur survie ou les accueillant aux USA pour leur permettre d’échapper à la barbarie nazie. Ces deux axes forts du parcours se retrouvent dans le catalogue nourri d’une riche iconographie autour des publications de la galerie et des installations. Le catalogue édité par Bernard Chauveau réunit des essais de Serena Bucalo-Mussely, Catherine Dossin, Fabrice Flahutez, Jack Flam, Claudine Grammont, Marianne Jakobi et Johanne Lindskog.

L’exposition a bénéficié de prêts majeurs de la Pierre & Tania Matisse Foundation (New York) et de la collection Ezra & David Nahmad. De la donation Pierre Matisse à l’État français, dont le Musée national d’art moderne fut le bénéficiaire, sont présentés 15 chefs d’oeuvre que l’institution parisienne a généreusement prêtés au musée, ouvrant la voie à la signature d’un partenariat pluriannuel entre la Ville de Nice et le centre Pompidou.

11 juin au 30 sep, Musée Matisse, Nice. Rens: musee-matisse-nice.org

(photo : Soirée d’adieu à New York des Surréalistes chez Pierre Matisse le 20 novembre 1945. De gauche à droite, en arrière-plan : Roberto Matta, Yves Tanguy, Aimé Césaire, Henri Seyrig, André Breton, Denis de Rougemont, Nicolas Calas, Marcel Duchamp, Esteban Francés. Au premier plan : Elisa Claro Breton, Suzanne Césaire, Sonia Sekula, Jackie Matisse, Patricia Kane Matta, « Teeny » Matisse, Elena Calas Collection particulière © D.R.)