L’art de l’illusion

L’art de l’illusion

Dans le cadre des festivités du 70e anniversaire de la Chapelle Matisse de Vence, et en parallèle de l’exposition Matisse, méditation vençoise qui se déroule à partir d’une œuvre majeure réalisée par l’artiste durant son séjour à Vence en 1944, Jeune femme à la pelisse sur fond rouge, le musée de la ville propose une intervention de Georges Rousse, Ici et maintenant.

Si celui-ci est connu pour son travail photographique, il s’empare ici des découpes et des couleurs chaudes du peintre et, plus encore, il se confronte à une œuvre monumentale de Sol LeWitt sur l’ensemble d’une salle attenante. L’effet est spectaculaire quand, par un effet d’anamorphose, les deux compositions murales se confondent et se contrarient mutuellement. L’impact de la couleur sur les figures géométriques détourne les perspectives promises par les lignes tracées par Sol Lewitt sur des surfaces planes tandis que Georges Rousse, en usant d’une même gamme chromatique, prolonge ce jeu à partir des reliefs et des stucs présents dans une autre salle. Le spectateur est immédiatement saisi par une mise en scène qu’il doit lui-même définir en s’insérant dans un point déterminé de l’espace.

Georges Rousse intervient ici comme peintre et architecte qui perturbe le réel et le quotidien. Dans l’ensemble du Musée de Vence, il dissémine une série de travaux réalisés à travers le monde sur des sites désaffectés qu’il retravaille pour les métamorphoser à partir de jeux d’illusion et de perturbation symétrique. Une fois recomposé, l’espace du bâtiment est photographié. La conception de celui-ci est déterminante, car elle s’appuie sur le temps. Si le volume du lieu reste identique, la façon de l’habiller autrement, par des jeux optiques ou par de multiples collages de journaux, place le spectateur dans cette béance entre l’avant – un lieu promis à la décrépitude et à la mort – et l’après qui fixe à jamais ce lieu dans une image. Celle-ci promet pourtant l’idée d’une renaissance quand l’artiste ne propose plus une autre réalité, mais dépouille l’espace de toute fonctionnalité pour se confronter à l’imaginaire. Les lieux investis se transforment en œuvres d’art et c’est alors toute l’architecture du musée-château qui se trouve transformée par la grâce de l’illusion.

Rappelons que ces expositions s’inscrivent dans le cadre des célébrations du 70e anniversaire de la Chapelle Matisse, inaugurée en 1951. La ville de Vence proposera donc, en parallèle, d’innombrables rendez-vous artistiques et culturels tout l’été, comme des parcours de visites, un musée numérique, des projections, des concerts, des ateliers

Henri Matisse, Jeune femme à la pelisse sur fond rouge, 1944, Huile sur toile (72 x 60 cm), Donation Alice Tériade, 2000, Musée départemental Matisse, Le Cateau-Cambrésis © Succession H. Matisse © Musée départemental Matisse, Philip Bernard

Matisse, médiation vençoise : jusqu’au 10 oct / Georges Rousse, Ici et maintenant : jusqu’au 12 déc. Musée de Vence. Rens : facebook.com/museedevence06

(photo : vue de l’exposition Georges Rousse, Ici et maintenant. Vence 2021 © Georges Rousse Adagp)