04 Oct Quelques fragments d’Hannah
Comment déclencher le désir de penser ? Une faculté somme toute banale, inhérente aux mammifères que nous sommes. Cette question est apparue comme une nécessité vitale pour Charles Berling, directeur de Chateauvallon-Liberté, à l’issue d’une année extraordinaire où la Culture a soudainement été niée, déclarée non essentielle…
En ce début de saison 2021-2022, il est l’heure, selon Charles Berling, de tous nous plonger dans les textes puissants d’une des plus grandes philosophes du XXe siècle, Hannah Arendt. Mais pas évident d’aborder son œuvre tant elle est immense. Pas plus que mettre en scène une pensée. « Nous sommes au théâtre, dit Berling, pas à l’Université. Ce n’est pas du tout un spectacle pour spécialistes » ! Dans une mise en scène où rien n’est superflu, il utilise juste les effets nécessaires pour laisser aux mots le temps de pénétrer lentement nos esprits curieux.
L’interprète, Bérengère Warluzel, a choisi ces Fragments qui résonnent particulièrement aujourd’hui. « Tout dans son œuvre nous parle, nous dit quelque chose de pertinent sur le monde où nous vivons aujourd’hui« , confie-t-elle. Textes philosophiques, politiques, mais aussi fragments de poésie qui fut son jardin secret et la grande affaire de sa vie : pendant 40 ans, Hannah Arendt ne cessa d’écrire sur l’exil, l’amour, la mort, la nature et la nostalgie. C’est pourquoi cette pièce se veut un parcours ludique, une traversée partagée qui ouvre l’accès à la liberté de penser par – et pour – soi-même.
Penser était la grande question d’Arendt pour qui l’absence de pensée avait conduit aux tragédies de l’histoire, le totalitarisme et le fascisme. La philosophe a traversé tous les débats du siècle, sans jamais céder ni sur son indépendance d’esprit ni sur sa lucidité : face au totalitarisme, au racisme et aux mouvements pour les droits civils aux USA, face à la création de l’État d’Israël et au devenir du sionisme, face à la révolte de la jeunesse des années 60… « L’essentiel pour moi, c’est de comprendre : je dois comprendre« , dit-elle. Nous aurions bien besoin de ses lumières pour nous aider à appréhender le temps d’aujourd’hui, en pleine négation de l’humain et du vivre ensemble qui habite de médiocres « Zorro ».
5 au 10 oct, Théâtre Liberté, Toulon. Rens: chateauvallon-liberte.fr
(photo : Fragments © Vincent Berenger Chateauvallon – Liberte Scene Nationale)