Des Fleurs pour les audacieux

Des Fleurs pour les audacieux

Ainsi s’intitule la série de bouquets de l’artiste plasticien Gregory Forstner, adressée aux plus courageux d’entre nous. Il ne s’agit que d’une œuvre parmi les autres exposées au Suquet des Artistes à Cannes et à la Galerie Eva Vautier à Nice.

Forstner investit la résidence d’artistes cannoise dans le cadre de l’exposition Le soleil brûlant sous les paupières fermées, à découvrir jusqu’au 5 décembre. Plus de 50 peintures et dessins retracent le parcours de ses dernières années, entre Montpellier, New-York et Nice. Les toiles portent l’empreinte de larges coups de brosse, traduisant la fougue et la rage destructrice qui habite le plasticien. Illustrations vives et colorées, puissance chromatique, force expressive : les compositions frappent par leur impact visuel. Gregory Forstner s’amuse à représenter des scènes effrayantes entre allures de fêtes macabres, massacres et carnavals ou kermesses sanglantes. Le but est de décrire le caractère grotesque et cruel de l’humanité, l’absurdité de notre monde contemporain à la dérive. Les références historiques s’accumulent en une œuvre énigmatique, radicale et désinvolte, saupoudrée d’humour grinçant.

On retrouve à nouveau la peinture dérangeante, singulière et expressionniste de Forstner à la Galerie Eva Vautier. Jusqu’au 6 novembre, elle propose notamment des œuvres inédites, réalisées durant le confinement. Ces dernières sont imprégnées de l’angoisse et l’asphyxie du Covid : que peindre alors que le monde est en pause et quel intérêt de créer, isolé, sans le public ? Le plasticien se concentre sur le motif du bouquet. Avec la série Lollipop, il revisite le thème désuet de la fleur en la sortant du carcan du vase. Des fleurs qui se répandent en vastes mouvements incontrôlés. Il précise que les bouquets dont il s’inspire sont des faux, en plastique, dénichés sur Google Images : des natures mortes, puisque jamais vivantes. Gregory Forstner jongle avec une peinture tantôt innocente, tantôt bouffonne, jamais lasse de surprendre, rageuse puis onctueuse, indéfinissable et insaisissable. Certaines dépeignent des figures allégoriques, notamment des hommes à tête d’animaux ou des chiens habillés à la Vélasquez. Représenter l’homme en animal, c’est dénoncer notre modernité aliénante et sa désinvolture. Chaque toile est une fable qui donne une leçon sur nos sociétés modernes. Forstner s’inscrit dans cette lignée d’artistes qui invoquent l’art pour dénoncer les mœurs de son temps.

Le soleil brûlant sous les paupières fermées : jusqu’au 5 déc, Suquet des Artistes, Cannes. Rens: cannes.com
Lollipop : jusqu’au 6 nov, Galerie Eva Vautier. Rens: eva-vautier.com

(photo Une : Gregory Forstner © Francine Kreiss)