Pierre et le Loup, chef-d’oeuvre intemporel à Monaco

Pierre et le Loup, chef-d’oeuvre intemporel à Monaco

Ce sera l’un des temps forts du weekend de clôture du Printemps des Arts de Monte-Carlo, qui verra tout de même se succéder l’Orchestre Philharmonique de Radio France, le Trio Xenakis, ou encore Renaud Capuçon et l’Orchestre Philharmonique de Monte-Carlo : la venue de The Amazing Keystone Big Band, le samedi 2 avril, pour une (ré) interprétation d’un chef-d’œuvre de Prokofiev, intitulée Pierre et le loup… et le jazz !

La première du mythique conte musical Pierre et le Loup de Sergueï Prokofiev date de 1936. En pleine période stalinienne, la directrice du théâtre central des enfants de Moscou commande une œuvre éducative au compositeur, qui en écrit la musique, mais aussi le texte, a priori – et nous insistons sur le a priori – dans le respect de la propagande de l’époque. L’histoire est simple : le jeune Pierre, enfreignant les interdictions de son grand-père, réussit à capturer, avant l’arrivée des chasseurs, un loup menaçant, et le fait enfermer dans un zoo. Pierre est donc l’incarnation d’un jeune pionnier soviétique, qui porte en lui les valeurs de courage et d’ingéniosité. Mais le message est-il aussi manichéen ? On peut en douter, lorsqu’on sait à quel point Pierre et le Loup a réussi à parler à toutes sortes de publics et su s’adapter à de nombreuses transpositions.

Quelques 85 ans plus tard, le chef-d’œuvre de Prokofiev est toujours d’actualité : d’abord, d’un point de vue purement pédagogique, on a rarement imaginé aussi bonne initiation aux instruments de l’orchestre classique. Cette partition est aussi une mise en lumière de l’écriture musicale symphonique : chaque thème, représenté par l’un des personnages de l’histoire, s’entremêlant avec les autres pour construire l’ensemble de la musique.

Preuve de son succès, l’œuvre a été enregistrée dans plus de 12 langues différentes, mais aussi adaptée à d’autres instruments ou d’autres genres, comme dans cet arrangement proposé par The Amazing Keystone Big Band, fondé en 2010 par le pianiste Fred Nardin, le saxophoniste Jon Boutellier, le tromboniste Bastien Ballaz et le trompettiste David Enhco, par ailleurs Révélation aux Victoires du Jazz 2018, et passé maitre dans la création de spectacles familiaux, qui transpose l’initiation musicale d’une œuvre au jazz et à la découverte du big band. C’est à une traversée des styles, du jazz des années 20 à celui des années swing, que nous invite cette version intitulée Pierre et le loup… et le jazz !, montrant ainsi combien une œuvre d’art peut transcender le temps, sans perdre son âme.

Mais au-delà de la musique, n’est-ce pas la valeur symbolique de l’histoire qui en fait son succès ? Dépassant les traditions d’un ancien monde, celui du grand-père, Pierre s’émancipe, faisant preuve de sa capacité à affronter les épreuves, les peurs, en lien avec la nature amie, personnifiée par les animaux. Indépendance, courage, perspicacité seraient donc les valeurs portées par ce conte, qui résonnent une fois de plus avec l’actualité.

2 avr 15h, Opéra Garnier de Monte-Carlo, Monaco. Rens: printempsdesarts.mc