27 Juil L’éducation au service de la transition
J’ambitionnais un grand dossier pour ce sujet qui me tient tellement à cœur. Lorsque le magazine Ressources a dû jeter l’éponge début 2018, j’ai créé dans la foulée une association du même nom dont l’objet premier est l’éducation. Non pas avec le projet inutile de perpétuer quelque chose qui n’est plus, mais simplement parce que les activités éducatives ont toujours fait partie de ma vie. Avec une intensification depuis 2018, et même une spécialisation : ateliers philo, sensibilisation aux enjeux du développement durable, à l’économie sociale et solidaire, éducation à la presse et aux médias…
Voilà pourquoi j’avais pas mal d’ambition pour ce dossier. Un ensemble de raisons, surtout personnelles, ne me permettent pas de lui donner tout le déploiement qu’il méritait. D’une double-page, nous passons donc à une simple page sur ce numéro. Et ce n’est pas du fait de La Strada, je tiens à le préciser.
Au sein de l’équipe Anthroposcène, Jessica Pellegrini nous propose , à l’intérieur de ce format exceptionnellement réduit, une réflexion XXL sur les enjeux de l’éducation en 10 anamnèses : 10 commandements pour transformer notre système de valeur.
Pour ma part, je voudrais juste rebondir sur cette tendance actuelle à traquer les mots plutôt que les actes. Nous interrogions dans un précédent numéro celui de résilience. En d’autres termes il est vrai que ceux bien peu amènes du Monde Diplomatique (mai 2021), toujours prompt à jouer de l’ironie mordante dès l’instant où ce ne sont pas les concepts de «matérialisme historique» ou de «dictature du prolétariat» qui sont sur la sellette. Pierre Rabhi et sa «sobriété heureuse» avaient été bien servis par cette prose idéologisée.
Lors de la soirée de projection du documentaire Archipel d’Olivier Eschapasse, le débat avait commencé par cette question dans la salle : «mais qu’est-ce qu’on entend par transition, d’abord ?».
Comme si rien n’avait été écrit ni théorisé jusqu’à présent sur la question.
«Notre société – ou plutôt notre civilisation moderne et industrielle – entre dans ce que les permaculteurs appellent la «grande descente énergétique», un euphémisme qui désigne ce qui pourrait ressembler à un effondrement de civilisation, et plus précisément de notre civilisation thermo-industrielle. » (Petit traité de résilience locale, 2015). Après deux siècles et demi d’addiction aux énergies fossiles, drogue si bon marché qu’elle a permis tous les excès, le temps du sevrage est arrivé…
Oui, on peut interroger indéfiniment les mots. Un mal très français peut-être. Exégèse de l’exégèse. Il me semble beaucoup plus intéressant, urgent surtout, de diffuser, d’infuser même, le plus largement possible, dans toutes les institutions éducatives, de la maternelle à l’ENA, du collège de Roquebillière à AgroParisTech, les concepts opérants que véhiculent les mots de la transition : frugalisme, sobriété, économie circulaire, écolonomie, permaéconomie, externalités, permaculture, low tech, upcyling, care… Que chacun de ces mots, aptes à couvrir d’eczéma n’importe quel chroniqueur du Monde Diplo, viennent enrichir les programmes éducatifs, nourrir leurs «référentiels», non pas comme éléments folkloriques de ces derniers, mais comme paradigmes centraux du changement. Juste parce que «l’éducation est l’arme la plus puissante pour changer le monde» (Nelson Mandela).
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