14 Sep L’Avare, un glorieux salopard
Molière, ta fête n’est pas finie ! C’est L’Avare qui ouvre les saisons respectives d’Anthéa à Antibes et du Théâtre Liberté à Toulon. L’occasion de (re)voir le saisissant Michel Boujenah, nommé aux Molières justement, dans l’adaptation tout aussi magistrale de Daniel Benoin.
Si je vous dis un homme très âgé, qui traque une très jeune fille, tyrannise ses propres enfants et ne pense qu’à l’argent ? Vous pensez : un salopard ? Un salopard, oui, mais pas n’importe lequel. L’Avare, ce monstre humain, célèbre depuis sa création il y a 350 ans, est toujours si cruellement moderne. Des comédiens illustres ont incarné Harpagon* : Jean Vilar, Michel Bouquet, Michel Serrault… À commencer par Molière lui-même. Michel Boujenah a mis ses pas dans les leurs pour donner vie à ce personnage monumental. « Pour un acteur, l’un des 20 rôles les plus dingues du répertoire, a-t-il confié. Ça reste un monstre et ça m’amuse beaucoup ce côté salopard absolu« .
Les 400 ans de Molière vont donc se terminer en beauté du côté d’Antibes et de Toulon. Après avoir foulé les planches parisiennes du Théâtre des Variétés à Paris, reçu une nomination aux Molières, et avant une tournée en France, Suisse, Belgique et sans doute au Canada, L’Avare est de retour à Anthéa, pour deux représentations, dans la version mise en scène par son directeur, Daniel Benoin. Facile de convaincre un autre directeur-acteur de théâtre de la région comme Charles Berling de faire également son ouverture de saison, avec trois représentations de la pièce. Comme indiqué par le théâtre toulonnais, « Michel Boujenah nous régale. Il donne à L’Avare la dimension d’une grandeur tragique où petitesse et pingrerie sont drôles dans les furies et l’excès des manies, inquiétantes et cauchemardesques, dans le dérèglement d’un pouvoir absolu« .
Ce n’est pas Daniel Benoin, directeur d’Anthéa, qui dira le contraire, lui qui a justement choisi de mettre en scène cette pièce tel un long cauchemar, dans le froid de l’hiver, avec des lumières qui glacent l’ambiance, à l’image du cœur d’Harpagon lui-même. « Dans L’Avare, la lumière joue un rôle particulier pour exprimer les travers et la solitude du personnage« , complète Daniel Benoin, en charge des lumières du spectacle. « Cela m’intéresse aussi d’intégrer la vidéo dans les spectacles et particulièrement dans L’Avare. Il y a du déséquilibre dans cette pièce comme dans un mauvais rêve. Grâce aux effets produits, la vidéo permet de donner une dimension supplémentaire à ce déséquilibre ». Et de conclure : « Même quand il s’agit d’une comédie, Molière porte un regard profond sur la société, sur l’homme, sur la passion, sur le désespoir humain… Son théâtre défend des thématiques fortes que l’on peut réinventer. Les spectateurs s’amusent de la farce et sont touchés en même temps. » J’ai mon billet et vous ?
24 & 25 sep, Anthéa, Antibes. Rens: anthea-antibes.fr
29 sep au 1er oct, Théâtre Liberté, Toulon. Rens: chateauvallon-liberte.fr
*Du latin harpago, harpon, rapace.
photo : L’Avare © Philip Ducap