06 Oct Les feux de l’amour
Décidément à la pointe de l’originalité et d’une grande exigence en termes de politique culturelle, la Principauté de Monaco et l’Orchestre Philharmonique de Monte-Carlo frappent fort avec Déjanire, opéra de Camille Saint-Saëns, qui sera joué en version concert, le 16 octobre.
Cette représentation s’annonce être un moment marquant pour les fans du célèbre compositeur du Carnaval des animaux, et pour tous les mélomanes curieux d’entendre cette œuvre plus jamais donnée à Monte-Carlo, depuis sa création en 1911 !
Drame lyrique en 4 actes, Déjanire fut présenté une première fois le 28 août 1898 à Béziers, pour l’inauguration des arènes, puis la même année, à l’Odéon, sous la forme d’une tragédie en prose rythmée écrite par Louis Gallet, grand ami et collaborateur de Saint-Saëns, qui l’avait envisagée habillée de chœurs, de danses et de parties symphoniques. Succès immédiat qui donne au compositeur l’idée d’une adaptation en drame lyrique, entièrement chanté. Saint-Saëns, qui entretenait des liens étroits avec la Principauté de Monaco, fut contacté par le prince et la direction de l’Opéra pour concevoir un nouveau projet : il reprend alors la première version de Déjanire et la retravaille sous la forme d’un opéra. L’importante partie musicale, déjà composée, demeure et se déploie alors plus amplement sur l’ensemble de la partition.
Voilà que, 111 années plus tard, Déjanire rentre donc au bercail ou presque, car cette fois, l’opéra sera donné dans le très confortable Auditorium Albert III.
Des conditions optimales pour pleinement déguster chaque note jouée par l’Orchestre Philharmonique de Monte-Carlo dirigé par Kazuki Yamada, pour physiquement ressentir la force collective et toute l’amplitude vocale du Chœur de l’Opéra de Monte-Carlo conduit par Stefano Visconti, et bien-sûr, pour savourer chaque nuance et subtilité de tessiture dans les voix de la mezzo-soprano Kate Aldrich (Déjanire), du ténor Julien Dran (Hercule), de la soprano Anaïs Constans (Iole), du baryton Jérôme Boutillier (Philoctète), et de la mezzo-soprano Anna Dowsley (Phénice)…
Mais qui est Déjanire ? Déjanire, c’est l’épouse délaissée de l’impitoyable guerrier Hercule, vainqueur et assassin d’Eurylos roi d’Œchalie. Il laisse une fille, la jeune et jolie Iole. Hercule, au grand dam de Déjanire, décide d’épouser son joli trophée de guerre qui en pince pour Philoctète. Mais elle doit renoncer à son amant, car Hercule le tuera, si Iole ne lui cède pas. Déjanire intervient et ressort de son placard une tunique ensanglantée que lui avait autrefois confiée, au seuil de la mort, le Centaure Nessus en lui disant qu’elle garantirait à vie la fidélité de son très volage Hercule. Déjanire donne le vêtement à Iole pour l’offrir à Hercule, le soir des noces, ignorant son terrible pouvoir maléfique. À l’instant où il enfile la tunique, Hercule se tord de douleur sans pouvoir la retirer. Le tissu, imprégné de poison, lui arrache la peau. Fou de souffrance, il se jette dans un brasier et part en fumée rejoindre les dieux, sous les yeux de Déjanire qui comprend, trop tard, la… glaciale vengeance du Centaure. Oui, « Amour est feu qui brûle » (Luis Vas de Camoes, poète portugais, 1525-1580).
16 oct 18h, Auditoruim Rainier III, Monaco. Rens: opmc.mc
Kate Aldrich © Fadil Berisha