12 Nov Histoire d’une histoire
À l’affiche du TNN, voici Les Antipodes d’Annie Baker, qui questionne la place qu’occupent les histoires dans notre monde en crise.
Huit scénaristes de télévision, réunis autour d’une table de conférence, planchent ensemble sur l’écriture d’une histoire totalement innovante. Comment faire du neuf quand tout, déjà, a été dit par d’autres ? Ça rame. Pourtant reconnus fines lames de l’écriture, ces pros de l’imagination ont les neurones en berne. Intervention coup de poing du 9e personnage, la coach de rédaction, qui souffle à chacun de faire appel à ses souvenirs les plus intimes. Électrochoc sauvage pour redémarrer la batterie des moteurs en panne d’idées.
Après The Flick, Prix Pulitzer de l’œuvre théâtrale en 2014, la jeune Annie Baker, comme le ferait une entomologiste, approche une loupe géante sur ses personnages et observe les tortueux méandres de leurs comportements erratiques. D’une redoutable acuité, sa plume épingle l’hilarante et tragique inaptitude qu’ont les humains à communiquer entre eux. Nous sommes les seuls êtres vivants « doués » de parole. Mais l’usage que nous faisons de ce don et du stock de mots qui va avec, suffit-il à comprendre l’autre et à nous en faire comprendre ?
Pour jouer Les Antipodes en Europe, les compagnies belges Le Canine Collectif et tg STAN ont réunis leurs univers pour une « collaboration intergénérationnelle et intercommunautaire« . Et ont fait appel au Collectif Cételle — équipe de traducteurs de l’université de Nice venus de différents pays anglo-saxons — afin d’englober les nombreuses nuances d’Antipodes version française, qui n’existait pas. Canine Collectif explique : « Les Antipodes est une pièce politique, mais tout est traité l’air de rien… Nous sommes presque dans du burlesque, du comico-tragique de la vie quotidienne… Elle parle d’une société qui écrase les individus sous des dehors très ouverts. » À l’heure où les réseaux sociaux explosent d’obscénité, où la mise en ligne de sextapes de « stars » de la téléréalité ne choque plus personne, Baker pose la question de cette part d’intime que, paradoxalement, nous cherchons toujours à préserver.
22 & 23 nov 20h, La Cuisine – Théâtre National de Nice. Rens: tnn.fr