Chute libre

Chute libre

Installée depuis deux ans au 109 à Nice, la Cie Gorgomar multiplie les actions et les collaborations, toujours « au service de l’esprit de la connerie », pour reprendre les mots du duo de tête, Aurélie Péglion et Thomas Garcia. Celui-là justement, dont le personnage tout de bleu vêtu se nomme Monsieur Mouche, est un artisan de la chute aux sens propre et figuré. Dans les prochaines semaines, deux de ses créations sont à retrouver dans la région : Le Cabaret de Monsieur Mouche et Le Grand Orchestre de Poche, chacune jouée en trio. Encore mieux que rigolo.

Vu lors de l’événement annuel, Clown Power, monté par la Cie Gorgomar chaque automne au 109, Le Grand Orchestre de Poche a de quoi réjouir les mélomanes et… les autres aussi. L’association de trois ukulélés pris en main par un trio disparate, empli d’ego, de fausse rébellion et d’inspiration souveraine, donne vie à un grand tout qui se disloque entre les époques de l’histoire de la musique, se dispute le solo, s’amenuise dans une partition ultra touchante et s’accorde enfin, dans des instants de magie scénique. On vient ici après s’être défait de la posture docte de la critique : dans une apparente simplicité de jeu et de mise en scène, on se laisse volontiers embarquer dans un train de loufoqueries et de maestria savamment mêlées, avec arrêts fréquents en gare de la drôlerie. Donner le premier rôle à la maladresse ouvre, c’est touchant, les voies de la tendresse et du rire. Un technicien gaffeur chute à l’envi pour de faux, trimballe des éléments de scène qu’il démonte au gré de ses mouvements, invente des procédés scéniques bancals, croit récupérer l’affaire et empire la chose avec fracas, salit, casse et crache… C’est à peu près le rêve de tout enfant qui sommeille en nous, et auquel Monsieur Mouche donne vie.

Le Grand Orchestre de Poche © Frédéric de Faverney

Dans Le Cabaret de Monsieur Mouche, le trio qu’il compose avec Charlotte Saliou et Lionel Sautet livre d’intenses saynètes théâtrales, comiques, magiques, vocales, acrobatiques et chorégraphiques. Le factotum, l’administratrice de spectacles et le directeur de salle, grands professionnels des coulisses, se prennent au jeu de la poursuite lumière qui les inonde de gloire. Non sans hic et ratés. Dans leur show improvisé, ils peuvent enfin donner vie à leurs talents jamais vus de quiconque. Les attributs du clown sont effeuillés en scènes qui glissent de l’une à l’autre, avec une époustouflante capacité à tout savoir faire, tout savoir jouer, tout savoir être. Les corps de ce trio de clown aux allures de quidam sont « intégralement » mis en jeu et investis dans leurs atouts et défauts. On se laisse embrasser par l’absurde et l’invraisemblable, avec une franche liberté. Un spectacle parfois égrillard, et très recommandable !

Le Grand Orchestre de Poche: 13 déc, Scène 55, Mougins / Le Cabaret de Monsieur Mouche: 16 déc, Salle Juliette Greco, Carros. 10 mars, La Coupole, La Gaude. 11 mars, Théâtre de la Cité, Nice. 17 mars, Théâtre de Grasse. 27 mai, Théâtre de l’Hélice, Contes. 15 & 16 juin, Les Franciscains – TNN, Nice. Rens: gorgomar.org

photo Une : Le cabaret de Monsieur Mouche © Frédéric de Faverney