« Le Festival Trajectoires ? Une formidable aventure humaine »

« Le Festival Trajectoires ? Une formidable aventure humaine »

Les villes de Carros, Cannes, Grasse, Mougins, Mouans-Sartoux et Nice ensemble réunies autour d’un même événement ? Tel est le pari gagnant du festival pluridisciplinaire Trajectoires, impulsé et coordonné par le Forum Jacques Prévert de Carros (Scène Conventionnée d’Intérêt National pour l’Art, l’Enfance et la Jeunesse) et imaginé par son directeur, Pierre Caussin, que nous avons rencontré. Une 4e édition à découvrir jusqu’au 11 février.

Laurence Fey: C’est quoi le festival Trajectoires ?
Pierre Caussin: J’ai créé Trajectoires en 2019 à Carros et, depuis deux ans, ce festival s’étend au département. Mais c’est un tout, il donne à voir une dynamique collective, la cohésion des lieux culturels de ce territoire. Nous souhaitions donner une plus grande ampleur à la manifestation et montrer la volonté des structures de coopérer ensemble. Chaque directeur reste libre. Mais dans le cadre de Trajectoires, on prend tous le temps de discuter, de regarder les calendriers, de construire une manifestation cohérente sur tout le territoire, relayée par la presse locale et la presse nationale. Le fil rouge restant les récits de vie, contemporains, dans une approche pluridisciplinaire.

5 semaines de festival, 15 spectacles, 22 représentations, 8 théâtres, 6 villes… Que pouvez-vous nous dire de cette 4e édition, dont le versant « hors les murs » grandit chaque année ? Que vous a notamment apporté cette nouvelle collaboration avec la Villa Arson ?
Le partenariat avec la Villa Arson et l’Université Côte d’Azur est une première pour nous. Nous touchons ainsi le public étudiant, sur les lieux mêmes de leurs recherches. Il s’agit d’une proposition du directeur de la Villa Arson, Sylvain Lizon, aussi vice-président Culture et Société de l’Université Côte d’Azur. Pour le reste de la programmation, nos projets sont toujours aussi exigeants, comme celui de Jérôme Bel, et son spectacle « auto-bio-chorégraphique », ou Les Historiennes, celui de Jeanne Balibar, qui dure 3 heures. L’idée centrale cette année était d’améliorer nos modes de travail collaboratif, dans la même logique que le Festival de danse de Cannes, auquel nous participons aussi. Au fil des années, nous avons gagné en efficacité, nous capitalisons sur ce qui a été produit… C’est une formidable aventure humaine, tant au niveau des directions que des équipes. Le Festival est de mieux en mieux valorisé par chaque partenaire, qui jouent de plus en plus le jeu du collectif. Il y a une véritable envie, et l’on en voit les effets sur le public et même sur la presse. Trajectoires est entré dans les pratiques et les habitudes, il s’inscrit dans le paysage culturel du 06. La mayonnaise a pris !

Vous impulsez et coordonnez ce Festival sur les 6 communes. Comment cela se matérialise-t-il ?
Le principe est simple. Comme nous disposons d’un petit budget, chacun finance les projets qu’il propose. Le Forum Jacques Prévert de Carros apporte l’outil de travail et de coordination, et prend en charge toute la communication réalisée, payée et diffusée par nous. Nous fournissons tout le « pack com » : les programmes, les banderoles, etc. Nous nous appuyons sur deux professionnels pour la presse locale, la presse nationale et le lien avec les différents partenaires. Il y a ensuite une réciprocité, car chaque ville et chaque structure culturelle fait la promotion du Festival, via ses propres supports et ses propres outils-plaquette annuelle, réseaux sociaux. C’est du gagnant-gagnant, une dynamique avec un effet boomerang.

Les spectacles Jeunesse font également partie de l’ADN du Forum Jacques Prévert.
Sur ce point, nous sommes proches du Théâtre de la Licorne à Cannes, scène conventionnée comme la nôtre. Une bonne partie de notre programmation s’adresse aux jeunes, et on y veille. Comme le spectacle Mes parents, sur les relations familiales, truffé d’humour, J’ai trop d’amis, ou encore 1983, qui retrace le virage économique, politique et social de cette année-là. Nous tenons aussi à nos goûters philo dès 5 ans, ou à nos débats philo, dès 12 ans.

Des envies particulières pour l’année prochaine ?
Nous sommes en pleine discussion. Nous ne visons pas la croissance de partenaires, nous resterons à moyens humains constants ! Même si des demandes arrivent hors du département, ce qui est une preuve de reconnaissance. La dynamique restera coopérative, et le Forum Jacques Prévert restera garant de la ligne : défendre la création contemporaine, locale, et non le répertoire classique, mettre en avant les auteurs vivants, l’intime, les points de vue, les récits de vie, c’est ça l’ADN du Festival. C’est bénéfique pour tout le monde, car cela permet d’atteindre plus de médias, plus d’artistes et de générer plus de dates. Un petit plus pour le public : un billet acheté au Forum Jacques Prévert, permet d’obtenir un tarif réduit dans les 14 autres spectacles !

Quelle est votre plus grande satisfaction sur cette édition ?
La fidélité du public et sa diversité. Cela se ressent dans la fréquentation. De nouveaux spectateurs se sont déplacés. Notre affiche jaune et festive se repère de plus en plus et c’est positif. Nous avons accueilli davantage de monde que l’an passé. Même les spectacles exigeants, et qui ne sont pas « tout public », réalisent de beaux scores. Le Forum Jacques Prévert se situe à Carros, pas à Nice ni à Cannes, cela peut représenter une contrainte. Mais le public vient, même pour les propositions les plus pointues, et c’est un bon indicateur. Capter ces différents publics, c’est plus facile dans une dynamique de festival, avec l’implication de tous, dans une belle synergie…

Un chef d’orchestre créatif
Avant de reprendre la direction du Forum Jacques Prévert de Carros, Pierre Caussin travaillait pour le Théâtre de la Cité de Marseille et notamment son célèbre Festival des écritures du réel. Déjà un travail de coopération, de mise en avant de la création contemporaine et de mixité sociale.

Jusqu’au 11 fév 2023, Forum Jacques Prévert (Carros), Théâtre National de Nice, Théâtre de Grasse, Médiathèque de Mouans-Sartoux, Scène 55 (Mougins), Théâtre La Licorne (Cannes), L’Entre-Pont, la Villa Arson et Le 109 (Nice). Rens : forumcarros.com

photo : spectacle Nu, le 11 février à Mougins © DR