02 Fév Retiens la nuit
Le Théâtre de Grasse invite Laurent Gaudé et Fabrice Murgia qui ont imaginé un thriller d’anticipation où la notion de temps devient, plus que jamais, une valeur marchande, un monde où la nuit a disparu…
Face à nos modes de vie toujours plus connectés où le travail et la productivité prennent une place toujours plus importante, où l’âge du départ à la retraite recule toujours plus, où le fait de ralentir et prendre du temps pour soi est souvent vu d’un mauvais œil, la nuit est un peu l’un des derniers espaces de liberté universelle. Mais à quoi donc ressembleraient nos vies si la nuit n’existait plus ? Si la société libéraliste était poussée à un point tel que tout le monde pourrait travailler 24h/24 ?
C’est une hypothèse sur laquelle l’auteur Laurent Gaudé et le metteur en scène Fabrice Murgia ont décidé de se pencher en collaborant sur La dernière nuit du monde, pièce de théâtre où le personnage principal se lance dans une enquête à propos de la disparition de sa femme dans une société dystopique, au sein de laquelle la productivité est reine grâce à une pilule qui permettrait à l’homme de seulement dormir 45 minutes, sans aucun effet de fatigue. Dans ce monde où la vie est active, furieuse et ne laisse plus aucune place au rêve et au silence, une résistance se lève pourtant, menée par le Mouvement de la Nuit Noire avec à sa tête un mystérieux enfant-oracle… La dernière nuit du monde, créée avec succès au Festival d’Avignon 2021, est une pièce d’anticipation aux accents délibérément politiques : Laurent Gaudé et Fabrice Murgia se sont en effet inspirés de l’essai de Jonathan Crary, 24/7 – Le capitalisme à l’assaut du sommeil, où l’auteur explique que la nuit et le sommeil restent les derniers espaces pas encore capitalisés. « Si la nuit est pour nous, poètes, un espace préservé, elle n’en est pas moins un lieu de résistance au rouleau compresseur du monde capitaliste tel que nous le connaissons« , souligne ainsi Fabrice Murgia. Une pièce digne d’un véritable thriller sur un monde à la fois inquiétant et fascinant.
11 fév 20h, Théâtre de Grasse. Rens: theatredegrasse.com
photo: La dernière nuit du monde © Kurt van der Elst