28 Fév Zelda, femme brisée
À Mougins, la Scène 55 programme Alabama song, un spectacle-concert adapté du roman éponyme de Gilles Leroy qui rend la parole à Zelda, femme du célèbre écrivain, Scott Fitzgerald.
Compagne de Guillaume Barbot, auteur de la mise en scène, Lola Naymark raconte avec fougue une Zelda sans cesse réprimée dans sa veine artistique. Entourée de 3 musiciens-acteurs, Pierre-Marie Braye-Weppe, Louis Caratini et Thibault Perriard, elle passe en revue les multiples facettes d’une existence insolente et chaotique tandis qu’une bande son fait swinguer « L’ère du Jazz ».
Née en 1900 à Montgomery, Zelda Sayre, fille d’un juge en Alabama, détonne dès l’adolescence par sa beauté et son esprit d’indépendance. Elle boit, fume, danse et flirte sans vergogne, parfait prototype de cette génération nouvelle des jeunes flappers (nom donné aux jeunes femmes indépendantes de l’époque). Zelda croise Scott en 1918, soldat désargenté en garnison à Montgomery. Coup de foudre pour lui, qui, afin d’obtenir sa main – deux fois refusée – fait paraître en 1920 L’envers du Paradis. Peu après sa sortie, Zelda épouse Scott, enfin « riche et célèbre ». Début d’une fête ininterrompue ruisselante d’alcool et d’argent. Direction Paris. Le couple irradie, séduit. Le voici locomotive d’une jet-set intellectuelle lancée à plein régime dans toutes les extravagances. La fin des années folles sifflera la fin de l’insouciance. Krach de Wall-Street. Zelda s’ennuie et cherche à s’affirmer. À 26 ans, elle tente la danse avec ferveur. Échec. Épuisement. Abandon. La peinture, sans succès… Premier internement en 1930 de Zelda sur les hauteurs du lac Léman, diagnostiquée schizophrène. D’autres suivront.
Scott enrage quand en 1932, Zelda ose publier Accordez-moi cette valse, écrit quasi autobiographique, rédigé en 2 mois durant un énième passage en psychiatrie à Baltimore. L’écriture reste chasse gardée de son mari bien que l’inspiration l’ait déserté. Il n’hésite donc pas à puiser dans la personnalité fantasque de sa femme, ni à infuser des extraits entiers de lettres qu’elle lui adressait de Suisse, pour concevoir le personnage de Daisy dans Tendre est la nuit (1934), livre réponse à contrepied de l’unique publication de Zelda. »Parfois je me demande si Zelda n’est pas un personnage que j’ai créé moi-même« , dira Fitzgerald. Décembre 1940, à fond de cale, rongé par l’alcool, Scott meurt d’une crise cardiaque à 44 ans, à Hollywood. 8 ans plus tard, Zelda périt à Asheville en Caroline du Nord, dans l’incendie de l’hôpital psychiatrique où elle séjournait. Elle avait 47 ans. Boudé par la critique à sa parution, Accordez-moi cette valse bénéficiera dans les années 50 d’une forme de reconnaissance. Zelda avait donné à son personnage principal, le nom d’Alabama Beggs. Elle aura fini par faire entendre sa parole propre.
16 mars 20h30, Scène 55, Mougins. Rens: scene55.fr
Alabama Song © Benjamin Lebreton