La longue marche des femmes dans le 7e Art

La longue marche des femmes dans le 7e Art

En ce mois de mars, symbole du combat pour les droits de femmes, le cinéma art et essai Le Vox, à Fréjus, met à l’honneur le 7e Art au féminin lors de ciné-clubs réunis sous l’intitulé Des femmes d’exceptions, partout dans le monde.

Il y a de quoi ironiser, et je ne m’en suis pas privé, mêlant au passage ma voix à d’autres plus reprochables : l’enquête décennale de la revue britannique Sight and sound sur les plus grands films de l’histoire, véritable institution dans la profession, aura en 2022 réécrit l’histoire selon les codes et critères (du pire) d’aujourd’hui : Spike Lee y devance Mizoguchi, Claire Denis est préférée à Dreyer, et le reste est à l’avenant. Les communautarismes y ont enseveli la cinéphilie, et les militant(e)s de diverses causes ont renversé la table, sans rien Car, tandis que les ignorantins et les pharisiens s’acharnent à redessiner l’histoire au gré de leurs passions éphémères et volatiles, opérant une sorte de chef-d’œuvre à l’envers – la convergence navrante, car contre-nature, des authentiques cinéphiles et des rageux nostalgiques du patriarcat –, un mouvement profond, infiniment plus décisif, se fraie un chemin : le nombre de réalisatrices augmente tout doucement au sein de la corporation. Comme tant d’autres, le métier de cinéaste est de moins en moins un bastion masculin – même si les femmes représentaient toujours moins d’un réalisateur sur quatre en Europe, en 2022… Valoriser et encourager les femmes cinéastes aujourd’hui, c’est cela la véritable longue marche commune vers l’émancipation mixte, alors que les palmarès brejnéviens sont en réalité des obstacles inutiles et supplémentaires sur ce chemin, qui déjà n’en manquerait pas sans eux.

Cela tombe bien, car c’est à cela que s’emploie le Vox, le cinéma art et essai de Fréjus : les films réalisés par des femmes y ont (toute) leur place, non pas pour de mauvaises raisons (quotas et autres), mais tout simplement parce qu’ils sont intéressants, réussis, audacieux, passionnants. À cet égard, au mois de mars y sont programmés deux rendez-vous majeurs : d’une part, la quatrième séance de ciné#metoo avec Women talking, le nouveau film de la comédienne et réalisatrice Sarah Polley – la toute jeune héroïne de De beaux lendemains a bien grandi –, articulé autour d’une prise de conscience féminine collective au sein d’une communauté religieuse. Projection le lundi 13 mars 20h, suivie d’un échange avec le public.

Ensuite, dans le cadre du ciné-club hebdomadaire, le 20 mars 20h, sera présenté et projeté Houria, nouvel opus de la cinéaste algérienne Mounia Meddour. Remarquée via l’épastrouillant Papicha, déjà porté par l’intense Lyna Khoudri, Meddour joint à l’audace de la cinéaste le courage de l’algérienne. Car il est juste de rappeler que, si le féminisme est légitime sous toutes les latitudes, il peut devenir héroïque selon les régimes et les sociétés…

Empire of light de Sam Mendes, avec l’excellente Olivia Colman en directrice d’un petit cinéma, et Le bleu du caftan de Maryam Touzani complètent le programme.

Programme détaillé dans l’agenda et sur cinemavox-frejus.com

photo : Women talking de Sarah Polley © DR