Rouault, peintre de l’esprit

Rouault, peintre de l’esprit

Au Lavandou, la Villa Théo célèbre le printemps avec un hommage à l’inclassable coloriste français Georges Rouault (1871-1958). L’exposition Peintre de l’esprit est visible du 1er avril au 1er juillet 2023.

Artiste mystique inspiré par sa foi religieuse, contemporain des avant-gardes du début du XXe siècle, Georges Rouault est associé à la fois au cubisme, expressionnisme et fauvisme, même s’il occupe une place résolument indépendante parmi les artistes du XXe siècle. Très marqué par les œuvres de Courbet, Manet et Daumier, l’artiste né durant la Commune de Paris, qui a grandi dans les quartiers populaires de Belleville avant de devenir apprenti verrier à l’âge de 14 ans, se consacre rapidement et exclusivement à la peinture et se distingue très vite en présentant ses œuvres au concours du prix de Rome. Il se dit d’ailleurs le peintre des laissés-pour-compte, dont il donne une image expressive et intense, saturée de couleurs vives et de matière.

Rouault peint la marginalité, non pas pour stigmatiser, mais par compassion : on le constate dans sa série de toiles représentant des prostituées. On observe à la fois une dénonciation et une désolation de la dépravation :  il exprime dans son art son identification avec la pauvreté et la souffrance. « L’art en ce siècle mécanique ne serait-il pas parfois le miracle ? » Ces propos pleins d’espoir soulignent la destinée de l’artiste, dont la carrière est investie par la mission d’aider autrui. Sa fougue et son lyrisme font de lui le premier des expressionnistes. Comme le nom du mouvement l’indique, il s’agit d’exprimer par la forme, un sentiment. Georges Rouault procède donc à une œuvre qui parle, dont la technique exprime, dialogue, expie.

Les dix dernières années de sa carrière célèbrent aussi la beauté de la nature (fleurs, paysages, nus) et manifestent un souci décoratif nouveau (arabesques, bordures). Il multiplie les expositions en France, Belgique, à Londres, New York, Munich, Genève… Cette période rime avec une explosion de couleurs, une ivresse de la matière : c’est le couronnement de son œuvre. Il reçoit de nombreux prix et hommages, notamment au Palais Chaillot, c’est l’apothéose. Il s’agit du fruit d’une carrière au service de ses convictions et de son art, sans compromis. Très exigent, il brûlera 300 de ses œuvres, persuadé de ne pas être à la hauteur. À ce propos, il cite Bonnard : « Le terrible en art, c’est de savoir s’arrêter. » Rouault est une invitation à embrasser ce qui nous anime, ce qui accomplit, ce qui transfigure.

1er avr au 1er juil, Villa Théo, Le Lavandou. Rens: villa-theo.fr

photo: oeuvre de Georges Rouault © Courtesy Fondation Georges-Rouault – ADAGP 2023

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