Le Masseglia sound system déboule !

Le Masseglia sound system déboule !

Dans la Roya, ce petit pays du bout du monde français qu’une tragédie climatique a rendu hélas célèbre, Nathalie et Gwenn Masseglia ont fait de leur vécu de femme, mère, citoyenne et de celui de nombreuses autres habitantes de la vallée un spectacle tonitruant qui va résonner fort : Tempêtes. Première au Lavoir-Théâtre à Menton.

Le duo a créé ce spectacle au terme de plusieurs mois de tchatches avec les gens de la Roya. Nathalie, clowne de théâtre, auteure et metteuse en scène, y colporte son humour ravageur depuis un bail et a trouvé dans son personnage Mazarine l’expression burlesque et pathétique de la chose politique. Car le combat politique est au cœur de son action en faveur du droit à la culture en milieu rural (voir portrait Militante du droit à la culture en ruralité, La Strada n°352). Gwenn, musicienne, s’est révélée par le film multiprimé de son compagnon Rémy, Naïs au pays des loups, dont elle a signé la création musicale remarquée. Ensemble, elles accompagnent les gens du village de Breil et de l’EPHAD avec des chantiers d’écriture. 

Après le trauma de la tempête Alex et la crise migratoire qui a secoué cette vallée, ce spectacle arrive comme une catharsis. Le titre Tempêtes s’est imposé tant il en exprime les perturbations climatiques, physiques ou intérieures. « Ça nous parlait bien dans ce territoire maudit où tu te sens génial, qui est un petit peu « le fief des crises« … Tempêtes ça rime avec retraite ! » 

Une écriture participative de territoire

Recueillir la parole de celles et ceux qui y vivent a été énorme. Des femmes le plus souvent. « Ça nous parlait plus dans les inégalités, et dans ces territoires excentrés, celles-ci sont plus fortes« . Nathalie et Gwenn se sont plongées en résidence, avec tout leur bric-à-brac. Propos de mères, « ces victimes d’ados », angoisse de l’avenir – elles-mêmes sont entrées en écriture en pleine tourmente des affres du Parcours sup de leurs enfants. Souvenirs qui remontent même aux anciennes, frappées d’Alzeihmer. Pour les ados, les problèmes de harcèlement, de différences, de LGBT sont encore plus compliqués à vivre en milieu rural. « Faire parler d’homophobie, transphobie, c’est bien, mais les langues se délient sur ces sujets pas toujours dans le bon sens« . Les réseaux sociaux constituent heureusement une ouverture sur le monde bien que le sexisme systémique reste toujours solidement ancré. Tout comme le racisme que l’on croyait révolu, et qui a resurgi avec la crise migratoire. « Ça nous a remué le clocher dans le village ! » 

Le spectacle – mis en scène par Thomas Oudin, avec des regards extérieurs d’Olivier Debos, Inès Fehner et Guillaume Geoffroy, et une aide à l’écriture de Mandine Guillaume – est né de ce vaste recueil de paroles, en chansons et en jeu, avec une bonne part d’impro. Costumes dénichés au Secours Pop, décors tous recyclés, en palettes et plastique, le décor est planté. Les chansons racontent d’où les deux femmes sont parties, du mot tempête qui parle crise écologique, crise politique, comment elles ont écrit, comment ça s’est passé. « C’est vraiment la petite histoire du village et on l’a fait dans la grande histoire (..), on a réussi à donner au clown son rôle de porte-parole. »

12 mai 20h30, Théâtre du Lavoir, Menton / 17 juin, Festival de clowns L’Uzine à gag, Beaulieu / 12 juil, Festival Passeurs d’humanité, Breil sur Roya. Rens: FB CieDeLEmbrayageAPaillettes, FB nat.masseglia, lavoirtheatre.org
photo: Tempêtes © Nathalie et Gwenn Masseglia