Poétique du vent

Poétique du vent

À la croisée du geste politique, du corps à corps avec la matière, de la lutte avec les éléments, deux œuvres de Phia Ménard sont à découvrir à Châteauvallon.
Cela fait une quinzaine d’années que Phia Ménard a créé la Cie Non Nova imaginée comme le vecteur lui permettant d’exprimer le regard singulier qu’elle porte sur la jonglerie. Cette pratique circassienne a connu une profonde mutation grâce au renouveau apporté par Jérôme Thomas qui a ouvert de nouvelles perspectives en ajoutant aux éléments traditionnels des objets plus insolites comme des boules de pétanque, des plumes et même des sacs plastiques. Il a non seulement lié la jonglerie à d’autres formes artistiques comme la magie, la danse, la musique, mais il l’a intégrée à une dramaturgie. Une nouvelle façon d’appréhender le spectacle était née… C’est aux côtés de Jérôme Thomas que Phia Ménard a creusé son expérience avant de développer une approche plus personnelle autour de la notion d’injonglabilité. Elle propose d’appréhender par l’imaginaire notre relation aux éléments comme la glace, l’eau, l’air, dans le cadre d’un projet d’exploration artistique portant sur l’Injonglabilité Complémentaire des Éléments (projet I.C.E). Le théâtre couvert de Châteauvallon accueille en mai deux spectacles autour du vent, imaginés par la jongleuse, performeuse, chorégraphe et metteuse en scène française. L’après-midi d’un foehn, à voir en famille, résulte de la rencontre de ce vent chaud et de la musique de Debussy. Pour lui donner forme, Phia Ménard a constitué un inventaire à la Prévert : des sacs en plastique, un manteau, une paire de ciseaux, un rouleau d’adhésif, une canne et un parapluie. De cet ensemble hétéroclite jaillit un ballet de marionnettes guidées par le souffle de huit ventilateurs silencieux. Tout à la fois inédit et spectaculaire, ce foehn révèle toute sa poésie, ainsi que l’engagement de la chorégraphe, le plastique évoquant ici les poubelles, le pétrole, la consommation, la pollution, des entraves qu’il faut transformer, des pellicules étouffantes dont il faut s’extraire… Dans la continuité, la seconde installation-performance, destinée à un public plus mature, propose d’entrer dans l’œil du cyclone avec Vortex. Placé au cœur d’un tourbillon, l’individu doit lutter : contre le vent, mais aussi pour vivre et pour exister. Dans ce combat, il va devoir se transformer en passant par une multiplicité d’états d’être et de corps. Cette confrontation à lui-même va lui ouvrir de nouveaux espaces de liberté.

10 au 13 mai, Châteauvallon, Ollioules. Rens: chateauvallon-liberte.fr
photo: Phia Ménard © Éric Feferberg