23 Mai Jérôme Brunetière : « L’opéra parle à la modernité »
Le directeur de l’Opéra de Toulon, Jérôme Brunetière, vient de dévoiler le programme de la saison 2023-2024, la première qu’il a imaginé depuis sa prise de fonction en septembre dernier. Et pour une première, il va s’en passer d’en choses !
À commencer par le fait que le bâtiment, situé en plein cœur de ville, fermera un temps ses portes pour une rénovation de fond. Les décors de salle, les espaces publics et techniques, une grande partie de l’édifice qui s’appelait originellement le « Grand Théâtre » à son inauguration en 1862 va se refaire une beauté. Par conséquent, c’est hors les murs que se déroulera l’intégralité de cette nouvelle saison.
Plusieurs lieux accueilleront les 9 opéras, les 3 concerts symphoniques et les 7 concerts de musique de chambre, mais aussi le ballet D’un Matin de printemps du chorégraphe Emilio Calcagno et les 3 pièces de théâtre à l’affiche, parmi lesquels : le Zénith de Toulon et sa configuration de 1400 places capable d’accueillir de grosses productions, le Théâtre Liberté qui possède une fosse d’orchestre, le Palais Neptune qui recevra les concerts symphoniques, Châteauvallon, qui accueillera l’ouverture de cette nouvelle saison, en partenariat avec le Festival d’été du mythique site basé à Ollioules, ou encore la Villa Noailles à Hyères, pour ne citer que les principales scènes. « Au-delà, c’est dans tout le département du Var que l’Opéra va renforcer sa présence au plus près des spectateurs avec notamment une tournée qui, dès l’été 2023, fera voyager l’Opéra sous l’égide du Conseil départemental« , complète Jérôme Brunetière.
C’est à Châteauvallon, dès le mois de juillet, qu’aura lieu un prélude à cette nouvelle saison de l’Opéra de Toulon. Le Requiem de Mozart, du 19 au 26 juillet, dans le cadre du Festival d’été de Châteauvallon, inaugure une nouvelle collaboration entre la scène nationale varoise et la maison toulonnaise. Mis en scène par Bartabas, célèbre metteur en scène dont le travail associe traditionnellement art équestre, danse et musique, a choisi de sublimer cette œuvre du compositeur autrichien pour les écuyères et chevaux de l’Académie équestre nationale du domaine de Versailles. Sous la direction de Nicolas Krüger, l’Orchestre et le Chœur de l’Opéra de Toulon accompagneront les quatre chanteurs solistes. « Une distribution de solistes qui illustre, vous le verrez tout au long de la saison, une volonté de faire un travail important de détection de jeunes talents en début de carrière« , indique le directeur. La mezzo Eugénie Joneau en est ici un exemple, puisqu’elle a été nommée Révélation artiste lyrique aux Victoires de la musique classique 2022. En convoquant ce profil d’artistes, Jérôme Brunetière tient à « montrer la vitalité et le dynamisme des jeunes acteurs de l’Opéra d’aujourd’hui. »
C’est toutefois en septembre que sera véritablement lancée la saison 2023-2024, avec Ressusciter la rose (qui est un titre de travail, a priori provisoire), création mondiale présentée à la Villa Noailles, autour de l’histoire du célèbre site varois qui célèbre son centenaire. Hommage musical à la vie, l’œuvre et la mémoire de Marie-Laure et Charles de Noailles, cet opéra en trois actes, composé par le percussionniste Raphaël Lucas sur un livret de Simon Johannin, raconte, tout en faisant émerger des corrélations avec notre époque, l’aventure singulière de l’histoire des arts et de la société des années 1920-1930 dont le couple Noailles et les artistes qu’ils ont soutenus furent les acteurs. Une « création contemporaine inclassable », estime Jérôme Brunetière, qui verra l’Orchestre de l’Opéra de Toulon côtoyer le DJ Laurent Ta, et les voix lyriques de Jeanne Gérard ou Bastien Rimondi croiser celles de voix populaires comme Camelia Jordana ou Malik Djoudi ! Personnalité connue du monde lyrique, Vincent Huguet se chargera de la mise en scène, tandis que Patrick Bouchain, célèbre architecte, assurera la scénographie. « Le processus de création de cet ouvrage ne ressemble à aucun autre« , poursuit le directeur, qui estime plus largement que « l’opéra parle à la modernité« , notamment grâce à des mises en scènes toujours plus innovantes.
La saison couvrira un très vaste répertoire, car « il y a énormément de choses à dire dans 4 siècles d’opéra » ! Et si la création contemporaine est mise à l’honneur en ouverture, la maison toulonnaise reviendra également aux origines de ce genre né en Italie à Florence au XVIIe siècle, avec Le couronnement de Poppée de Claudio Monteverdi qui est « dramaturgiquement un chef d’œuvre » ayant permis que l’opéra y gagne une intemporelle modernité. Leonardo García Alarcón, prestigieux chef baroque, dirigera la partie musicale de cette production, mise en scène par Ted Huffman, créée au Festival d’Aix-en-Provence en 2022, et donné en avril 2024 au Théâtre Liberté. « Un vrai spectacle de troupe » avec une grosse distribution, au sein de laquelle certains interprètes joueront plusieurs personnages, soutenus par l’Orchestre Cappella Mediterranea.
Jérôme Brunetière a voulu donner un rôle central aux voix, cette saison. C’est pourquoi, en sus du Rigoletto de Verdi et des Chauves-souris de Strauss, présentés au Zénith de Toulon, mais aussi d’Orphée et Eurydice de Gluck au Théâtre Liberté, seront donnés deux opéras en version concert au Palais Neptune : Thaïs de Massenet et Les Capulet et les Montaigu de Bellini. Et pour compléter ce joli programme, une nouvelle production de l’Opéra de Toulon bouclera cette saison 2023-2024, Cavalleria Rusticana de Mascagni et Pagliacci de Leoncavallo, fleurons parmi les plus célèbres du mouvement musical vériste, quasiment toujours donnés ensemble. Valerio Galli, spécialiste du genre, en assurera la direction musicale, en juillet 2024… à l’occasion du Festival d’été de Châteauvallon ! Et la boucle est bouclée. C’est donc parti pour un périple de quelques mois sur les routes du département, avant de retrouver les ors de l’Opéra de Toulon en janvier 2026.
Dès le 19 juil, lieux divers, Toulon, Hyères, Ollioules. Rens: operadetoulon.fr
photo: Le couronnement de Poppée, Festival d’Aix 2022 © Ruth Walz