Sans foi ni loi

Dom Juan © C. Raynaud de Lage

Sans foi ni loi

C’est quasi un retour à l’essence même du théâtre de tréteaux que propose Emmanuel Daumas avec un Dom Juan, interprété par Laurent Lafitte, du 13 au 16 juin à La Cuisine. Une production de la Comédie-Française, programmée par le Théâtre National de Nice.

Ils seront cinq acteurs, dans un décor épuré, embrassant toute la grandeur du mythe écrasant de cet athée ouvertement libertin qui, au centre d’un monde de mensonges et d’illusion, fait le pari de la vie… Comment ne pas citer Dom Juan lorsque l’on évoque Molière ? Personnage phare du dramaturge qui fut créé dans des conditions très particulières. Après l’interdiction par Louis XIV, de la première version de Tartuffe, le Dom Juan née en quelques semaines sous la plume de Jean-Baptiste Poquelin fit couler beaucoup d’encre, puisqu’il revenait au théâtre avec une pièce sur le thème de l’hypocrisie et des faux dévots… 

Le metteur en scène Emmanuel Daumas propose ici une nouvelle adaptation contemporaine et élégante. Lever de rideau. La pièce commence avec un chant entonné par deux religieuses, des éclats de rire, et un Sganarelle qui vante les bienfaits du tabac, une cigarette à la main. Le ton est donné : sérieux et cocasse se mêlent pour évoquer les derniers jours de Dom Juan, cet anti-héros libertaire absolu. Juste la scène, 5 acteurs sur un ring en bois cerné de miroirs. Un décor tout en sobriété. « Cela me plaît d’imaginer Dom Juan avec (presque) rien. Cela n’empêche pas le spectaculaire, surtout à une époque où celui-ci dispose de moyens infinis, mais il émergera ici du travail des acteurs, de la surface de jeu qu’offre le plateau. La manière dont une scène quasiment nue peut contenir une infinité de lieux, d’actions, de déambulations, peut à mon sens être tout aussi impressionnante. » 

Entièrement vêtu de noir, Laurent Lafitte incarne Dom Juan, ce libre penseur, provocateur et sans foi. Pour Emmanuel Daumas, ce personnage transgressif est un « déconstructeur de valeurs obsolètes : la fidélité, la croyance en Dieu, la monogamie, le respect de l’autorité de l’Église… » Grand seigneur férocement dissolu, Dom Juan multiplie les conquêtes, abandonne sa femme Elvire qu’il a tirée du couvent et convoite la paysanne qui l’a sauvé d’un naufrage… Puis en séduit une autre… Mais à trop marcher sur le chemin de la perdition, la fin sera inéluctable et sans appel.

13 au 16 juin, La Cuisine – Théâtre National de Nice. Rens: tnn.fr

photo: Dom Juan © C. Raynaud de Lage