
31 Oct Fossile Murmure
La Station accueille actuellement Fossile Murmure, exposition de Thomas Teurlai, artiste habité par la forme, les matériaux, les pratiques rituelles. Exhumant des récits, bouturant sons, sculptures et sciences humaines, il redonne vie et mouvement à des objets et des histoires délaissées.
Pour l’installation Râle 21, dont il propose une nouvelle version, une Mercedes break est au cœur du dispositif. Ou plutôt des dispositifs : à une roue manquante dont le mouvement de l’essieu est provoqué par un moteur externe, Thomas Teurlai relie plusieurs engrenages du moteur. À l’arrière du coffre, une sorte d’immense déambulateur – ou d’autel – orné de fruits et de branchages fabrique un jus, une huile de palmiers niçois prête à lubrifier en continu le mécanisme détourné. Capot avant ouvert, le bolide à l’arrêt présente son moteur nu, à vif. Plusieurs capteurs relaient les sons émis en sortie de pistons. Ce râle donne le titre à l’œuvre et évoque à la fois un souffle poussif de fin de vie, un témoignage indiscret du fonctionnement des rouages, une preuve qu’il subsiste un cycle. Et nous voilà prêts à suivre le destin de cette huile qui s’engouffre là, ressort ici, déterminés à détecter le moindre « truc » qui assure la cohérence du tout. Le jeu de lumière, en ombres et projections, vient rehausser la magie de cette étrange scène à la poésie sourde.

L’œuvre Providenzad 2120, que Teurlai a installée au fond d’un large couloir sombre, semble d’abord relever du sacré, sculpture illuminée d’un faisceau vert extra-terrestre. Il s’agit d’un casque de moto à la visière grattée, à l’intérieur duquel des images sont projetées. Nous sommes face à un casque vide, empli d’images qui nous sont révélées à revers, en effets stroboscopiques. La voix de l’auteur de science-fiction Alain Damasio serine un texte politico-futuriste, dans une anticipation d’un siècle : en 2120, la Corse est sous l’eau, « (…) il coule du sable au robinet. La mer a la couleur du lait (…)« . Rares sont les images d’une Corse futuriste. Avec les mots de Damasio, nous y sommes.
Plongeant dans le bain d’OVNi (voir article page 19) et de l’Automne de l’image (voir La Strada n°358 et 359), La Station propose deux événements précieux les 17 et 18 novembre : Drive-In, une performance son et lumière de Thomas Teurlai en personne, au volant de sa Merco en sursis, et une sélection de trois films d’artistes diffusés dans la salle Pop-Up du 109.
Exposition, jusqu’au 2 déc • Performance, 17 nov 20h30 • Projections, 18 nov 15h. La Station – Le 109, Nice. Rens: lastation.org
photos : vues de l’exposition de Thomas Teurlai – La Station © Luc Bertrand