« Il vaut mieux encore être marié qu’être mort »

« Il vaut mieux encore être marié qu’être mort »

Pour le coup, on ne donnera pas tort au plus fourbe (quoique) des personnages qu’ait pu engendrer Molière, à qui Muriel Mayette-Holtz rend hommage en réinventant ses Fourberies de Scapin. Un spectacle punk et déjanté, à découvrir sur les scènes de La Cuisine à Nice et du Forum à Fréjus.

Dans cette nouvelle mise en scène, créée à domicile en janvier 2023, par la directrice du Théâtre National de Nice Muriel Mayette-Holtz, on oublie les fastes du port de Naples et le XVIIe siècle : c’est en plein désert, avec pour seul décor une vieille 2CV garée à proximité d’une pompe à essence, que se retrouve transportée cette aventure où fusent les mythiques dialogues du maître, servis par la Troupe du TNN. On y retrouve Octave et Léandre très épris Hyacinte et Zerbinette, qui ne plaisent pas vraiment à leurs pères tout aussi sévères que blindés de thunes. Alors pour les faire fléchir, ils demandent l’aide du rusé Scapin ! Mais s’il est doué pour faire rire, le célèbre valet recourt néanmoins à de bien étranges méthodes pour résoudre les conflits… 

« Cette farce de Molière est intemporelle, car elle met en scène la bonté des gens de peu, la fourberie naturelle des humains, bons vivants mais malins, généreux mais brutaux. Oui, la fable est rocambolesque et l’on peine à croire à tant de hasards… Mais la beauté de cette pièce est justement dans la capacité des protagonistes à imaginer leur vie plus folle et mouvementée que la misérable réalité de leur existence« , indique Muriel Mayette-Holtz, qui s’amuse ici avec les mots et les situations burlesques pour signer une comédie survoltée et contemporaine. « Nous sommes avec des valets qui n’ont rien, et de jeunes amants qui n’ont aucune autonomie. Les vieux gardent le peu qu’ils ont sans vouloir le partager. Cette misère est un terrain de jeu pour l’imaginaire et, avec une troupe comme celle du TNN, la possibilité de rebattre les cartes et d’explorer un monde pauvre mais attachant« , poursuit celle qui, malgré 8 ans passés à la Comédie-Française, n’avait encore jamais mis en scène un texte du célèbre dramaturge français !

« Pièce de troupe, écrite non pas pour la Cour mais pour le peuple« , dira son auteur, Les Fourberies de Scapin fut créé en 1671 au Palais-Royal pendant une période de travaux. Ce cher JB Poquelin souhaitait se libérer des contraintes des comédies-ballets et des comédies à machines, pour revenir au « théâtre pur ». Bien lui en a pris. Pour l’anecdote, cette pièce jouée 1 500 fois à la Comédie-Française, qui parle quand même pas mal pognon, ne rapporta pourtant quasiment rien lors de sa création ! La rançon de la gloire sans doute…

13 au 16 mars, La Cuisine – Théâtre National de Nice. Rens: tnn.fr
20 mars, Le Forum, Fréjus. Rens: theatreleforum.fr

photo : Les Fourberies de Scapin © Sophie Boulet