Le Printemps des Arts chante la Terre

Le Printemps des Arts chante la Terre

« La fin est mon commencement« , ce leitmotiv philosophique qui revient chaque année en exergue du Printemps des Arts de Monte-Carlo, prend cette année tout son sens, avec la place accordée dans la programmation aux chants de la Terre, déployés de différentes façons… Rendez-vous du 13 mars au 7 avril, pour une 40e édition foisonnante.

À l’époque romantique, « nombreuses sont les œuvres artistiques qui redéfinissent la relation entre l’individu et l’infinité des forêts ou des océans« , explique Bruno Mantovani, directeur artistique du festival, qui renvoie ainsi aux questions actuelles sur l’avenir de la planète et sur la notion de musique comme pure matière à penser pour tout ce qu’elle déclenche en nous. Le Chant de la Terre résonne évidemment pour les mélomanes avec le nom du compositeur Gustav Mahler, qui écrit à l’été 1908 ce cycle de mélodies pour ténor et baryton accompagné d’un orchestre symphonique, inspiré de poèmes chinois traduits par Hans Bethge. Cette œuvre monumentale, sorte de 9e symphonie du compositeur, sera déclinée tout au long du festival, tout d’abord par l’interprétation qu’en donnera l’Orchestre Philharmonique de Monte-Carlo (OPMC), sous la direction de son chef Yakuzi Yamada (6 avril), mais aussi dans une version de chambre originale avec le Het Collectief, Lucile Richardot et Stefan Cifolelli (16 mars), une autre façon de l’entendre. 

Elle sera également revisitée par le compositeur Laurent Cuniot, qui, tout en reprenant les poèmes qui ont inspiré Gustav Mahler, donnera sa propre version de ce cycle avec son Ensemble TM+ (29 mars). Enfin, l’opéra commandé à la compositrice Sophie Lacaze, L’étoffe inépuisable du rêve, qui tire son inspiration de la culture aborigène, évoquera la création du monde et peut-être également sa fin. Pour cet opéra de chambre en deux actes, Sophie Lacaze s’est inspirée de la longue relation qu’elle entretient avec cette civilisation, mais aussi du texte du librettiste, Alain Carré. Et c’est l’Ensemble orchestral contemporain, que dirige Bruno Mantovani, avec la mezzo-soprano Els Janssens, le ténor Xavier de Lignerolles et le baryton Romain Dayez qui créeront l’œuvre, le 16 mars au théâtre des Variétés. 

La nature en musique (mais pas que…)

La nature ne sera pas seulement présente à travers la musique : le plasticien invité pour cette nouvelle édition, la 40e du nom, n’est pas moins que le célèbre photographe brésilien Sebastiao Salgado, d’ailleurs soutenu par la Fondation monégasque Prince Albert II. Depuis des années cet artiste né dans la campagne brésilienne, témoigne de la nature originelle de la planète et milite, par la beauté du monde qu’il saisit, pour sa protection. Hommage lui sera rendu avec la projection du film Le sel de la terre de Wim Wenders et Juliano Ribeiro Salgado, le fils du photographe, le 17 mars au cinéma des Beaux-Arts, en sa présence. 

La Terre étant aussi ce qui nous nourrit, le festival s’est associé au chef Yannick Alléno, en duo avec le violoniste David Harutunian, pour un repas en musique à l’hôtel Hermitage. Ces « chants de la terre » se traduiront même de manière olfactive puisque la créatrice de parfum Clémence Besse a pour sa part imaginé un parfum aux couleurs boisées pour cette édition qui place la nature, à travers la musique, au centre de ses préoccupations. Quant aux enfants, ils ne seront bien-sûr pas en reste puisqu’ils aborderont la nature et ses créatures avec une version décoiffante et jazzy du Carnaval des animaux de Saint-Saëns par le Amazing Keystone Big Band de David Enhco (31 mars). 

Doit-on y lire un message, le festival débutera et s’achèvera par l’interprétation de trois requiem. L’un, en ouverture, signé Johannes Ockegem, qui revient aux origines de la Messe des morts et sera interprété par l’Ensemble Gilles Binchois que rejoindra le jeune saxophoniste Sandro Compagnon, matérialisant un dialogue entre ce passé et le présent (13 mars) ; les deux autres, venus eux aussi du fond des âges, refermeront la fin de cette édition : le premier, signé Pierre de la Rue, sera suivi de la Messe des Batailles de Clément Janequin, tous deux interprétés par le bien nommé Ensemble Pierre Janequin que rejoindra Les Saqueboutiers, ensemble de musique qui se consacre à la redécouverte de la pratique des cuivres anciens (7 avril).

Bruno Mantovani, l’évolutionnaire !

Si la Terre est le fil conducteur de cette nouvelle édition, on y retrouve également l’une des thématiques chères au cœur de son directeur artistique, celle de l’évolution stylistique, qui permet au public de pouvoir confronter, lors d’un même concert, œuvres de jeunesse et de maturité d’un même compositeur : ce sera le cas avec Schubert défendu par le Quatuor Modigliani (21-22 mars), puis Mozart et ses symphonies, avec l’Insula Orchestra que dirige la cheffe Laurence Equilbey, mythiques artistes qui font l’objet de deux des trois portraits proposés encore cette année (23-24 mars). Quant au troisième, c’est avec Bach et Britten que le violoncelliste Henri Demarquette questionnera l’évolution de l’écriture musicale de ces deux géants, séparés par trois siècles d’histoire (14-17 mars). 

Le festival multiplie toujours les façons de se relier à la musique, à travers les masterclasses, les siestes musicales, une nouveauté cette saison, mais aussi les befores et afters, les conférences, des concerts-promenades, un autre concert aux bougies et même un atelier participatif Danse Renaissance, le 31 mars, à partager avec les Ballets de Monte-Carlo ! La liste est longue… Le Printemps des Arts, flambant jeune à 40 ans, propose une fois de plus une grande diversité de rendez-vous, aux formats et aux contenus variés, au plus près de tous les publics qui savourent la musique.

13 mars au 7 avril, lieux divers, Monaco. Rens: printempsdesarts.mc

photo : Bruno Mantovani, Printemps de la création ©Hugo Sainte-Rose