Rêver la méditerranée

Rêver la méditerranée

La Terre est un jardin ! Bienvenue aux 12e Rencontres internationales Monaco et la Méditerranée (RIMM), les 7 et 8 mars au Musée Océanographique, qui nous ouvrent – gratuitement – les portes enchanteresses des Jardins méditerranéens. Avec, en filigrane, la question fondatrice de ce colloque annuel : la Méditerranée peut-elle aujourd’hui reconquérir son rôle civilisateur ainsi que son rayonnement ?

« Pour faire un jardin, il faut un morceau de terre et l’éternité« . D’où vient ce jardin dont parle Gilles Clément, qui résonne si joliment dans notre langue et qui nous fait rêver ? Les cultures humaines évoquent souvent un âge d’or où le paradis serait terrestre, matérialisé en une île ou un jardin qui concentrerait ce qu’il y a de meilleur au monde. Le jardin d’Eden… En vérité, bien avant qu’il n’abrite Adam et Eve, dans La Genèse, le « paradis » désignait sous l’Antiquité un parc ou un grand jardin irrigué et planté d’arbres. On pense aux jardins imaginaires, à Homère, à celui d’Alkinoos… Ce sont les Égyptiens qui nous ont laissé les témoignages picturaux les plus anciens de leurs jardins, vivriers et d’agrément.

L’utilisation du territoire méditerranéen depuis la préhistoire jusqu’à nos jours a alimenté nombre de littérature et recherches scientifiques. Dans l’esprit pluridisciplinaire qui les caractérise, ces 12e RIMM dédiées aux Jardins en Méditerranée s’annoncent riches en débats. Car le jardin méditerranéen, né d’une vieille logique paysanne, est bien plus qu’un simple jardin d’agrément. S’il a traversé le temps et inspire aujourd’hui encore les paysagistes, c’est qu’il permet de vivre en harmonie avec la terre, s’adaptant aux contraintes du climat. Ses plantes ont autant d’orgueil que la terre où elles sont entrées comme par effraction. Sèche et odorante (ô lavande, romarin et santoline !), sa végétation est luxuriante et ses couleurs vibrantes. Jadis frugal et productif, il devient écologique, gourmand, créatif, participatif… Surtout, il témoigne d’une alliance heureuse entre l’homme et la terre, qui perdure depuis des millénaires.

RIMM 2022 © Axel Bastello

C’est Alain Baraton, jardinier en chef du domaine du Trianon, du grand parc de Versailles et des Jardins de Marly qui ouvrira cette édition avec une conférence sur L’influence du jardin méditerranéen. Et c’est un petit bijou de cinéma qui la clôturera : Sous les figues de Erige Sehiri, ou comment un verger, lors d’une récolte de figues, devient théâtre de marivaudage, où les corps y sont tout autant érotisés que politisés. Entre ces deux temps forts, vous allez tout apprendre des moments clés de l’histoire du jardin, ses dimensions matérielles et spirituelles et son apport sur le plan des idées. Grands spécialistes et personnalités du monde scientifique, artistique et littéraire sont invités à dialoguer autour de trois thématiques. 

Le temps de l’Abondance : celui où la capture de l’eau, composante essentielle du jardin, permet de passer de l’indispensable au « superflu » à l’image de chefs d’œuvres tels la Villa d’Este de Tivoli, le Parc Güell, cité-jardin magique au cœur de Barcelone, ou de l’incroyable créateur de jardins Ferdinand Bac. 

Le temps des Vertus : plus question ici d’hédonisme, mais de science, de philosophie et d’élévation morale. Le jardin devient maître des vertus avec – pour autant de rendez-vous – Les jardins en herbiers, Le jardin des philosophes, Les jardins du roi René ou L’histoire du Jardin Botanique de l’Université de Padoue

Le temps du Merveilleux : enfin tout est possible, les artistes défient la nature en la sublimant. Les arbres ne perdent pas leurs feuilles, les fleurs ne se fanent pas, les fruits ne sont pas voués à la décomposition. Voilà que l’on s’approche du Paradis avec les fresques de la villa de Livie à Prima Porta, le merveilleux jardin du Printemps de Botticelli, ou les jardins homériques de L’Odyssée. Bref, deux jours pour atteindre le Nirvana… Sacré programme !

7 & 8 mars, Musée Océanographique de Monaco. Rens: rimm-mc.org

photo : Jardin de Hanbury Menton, Pavillon e fioritura Aloe © DR