L’Opéra de Toulon frappe fort avec Le Couronnement de Popée !

L’Opéra de Toulon frappe fort avec Le Couronnement de Popée !

En avril, l’Opéra de Toulon frappe fort avec Le Couronnement de Poppée, opéra en 3 actes de Claudio Monteverdi, créé à Venise en 1643. Ah, fichu désir, quand tu nous tiens…

Au Festival d’art lyrique d’Aix-en-Provence en 2022, l’œuvre mise en scène par l’américain Ted Huffman et dirigée par le claveciniste argentin Leonardo Garcia Alarcón, parmi les chefs baroques majeurs du moment, fit sensation pour son audace scénique et son érotisme franc. 380 ans plus tôt, à 75 ans, dans son ultime opus inspiré d’un sujet historique et non biblique, Monteverdi réussit l’alchimie parfaite de la musique et du théâtre et compose un opéra d‘une modernité qui atomise les rigidités académiques du passé. Surtout, le musicien magicien le plus célèbre d’Europe – « Oracolo della musica » (l’Oracle de la musique) – répand une ondoyante nappe de musique qui enrobe les mots pour mieux épouser le chant et les envoyer ricocher sur des coups de théâtre déstabilisants. La trame joue tout le registre émotionnel – lyrisme, comique, tragique – pour tisser une action tendue d’où crime et débauche ressortent insolemment vainqueurs. Et va jusqu’à s’offrir le luxe d’une fin parfaitement cynique, car les « méchants » ne passeront pas à la caisse pour leurs crimes. 

Le Couronnement de Poppée ou l’histoire d’une ambitieuse et séduisante garce qui voit grand. Prête à tout pour choper Néron (Nicoló Balducci), Poppée (Jasmin Delfs) n’a pas froid aux yeux. Elle met le feu au corps du jeune empereur… Désir, quand tu nous tiens ! Mais Néron est marié à Octavie/La Vertu (Victoire Bunel). Qu’importe, Poppée veut Néron. Elle veut ce mariage, elle veut le pouvoir. Octavie gêne, elle va devoir céder la place. Elle fait intervenir Sénèque le philosophe auprès de Néron pour lui éviter la répudiation. Poppée exige alors de Néron qu’il ordonne à Sénèque de se donner la mort. Dont acte. Octavie demande à Othon (Paul Figuier), amant de Poppée l’infidèle, de la tuer. Et le menace de l’accuser de viol s’il refuse. Le complot échoue. L’empereur les condamne à l’exil. Sur scène, un large tuyau suspendu balance mollement en barrant le plateau de sa longueur telle une sourde menace qui plane sur ces personnages empêtrés dans la complexité de passions incandescentes et rageuses. Des corps jeunes, beaux, nus. Il y a des caresses. Tout le monde en veut. Poppée n’a pas la main frileuse avec Lucain (Luca Bernard), l’ami poète de Néron. On se retrouve à trois, naturellement. 

Le chef Alarcón et sa formation Cappella Mediterranea jouent la partition avec rigueur et servent les voix au plus près de leurs émotions enfouies… Ah, oui ! Que nous dit le Prologue ? « La Fortune, La Vertu, et l’Amour dans le ciel se disputent leur supériorité, et finalement la prééminence est accordée à l’Amour. »

10 au 13 avr, Théâtre Liberté, Toulon. Rens: operadetoulon.fr

photo : Le Couronnement de Popée, Festival d’Aix-en-Provence © Ruth Walz