23 Mai Le jazz se conjugue à tous les temps
Une semaine de jazz à Ramatuelle pour inaugurer l’été dans le délicieux théâtre de verdure qui accueille ce festival : cinq concerts qui balaient l’histoire du jazz en nous projetant vers son avenir, à travers des formations de carrures très différentes.
Au cœur de cette programmation, deux grands orchestres redéploient le passé : l’Amazing Keystone Big Band d’abord, remarquable phalange qui depuis presque 15 ans construit ses répertoires à partir de l’héritage classique. Il rend maintenant hommage aux deux géants qui ont construit la tradition du jazz : Duke Ellington et Count Basie. Souvent associés, car ils ont illuminé le jazz classique et dansant avec des instrumentations assez semblables. Et pourtant totalement opposés : Basie roule dans une Cadillac merveilleusement huilée, qui réagit au moindre coup d’accélérateur ; Ellington est, lui, au volant d’une intrépide Torpédo qui emprunte tantôt l’autoroute, tantôt des routes sinueuses de montagne. Le big band créé et dirigé par Bastien Ballaz, Jon Boutellier, Fred Nardin et David Enhco, reprend ces itinéraires avec des pilotes d’aujourd’hui qui inventent de nouveaux parcours.
Christophe Del Sasso a également un big band, composé essentiellement de musiciens varois (dont le trompettiste Nicolas Folmer), et avec lequel il imagine de nombreuses créations. Pour l’occasion, la joyeuse bande reprend des compositions de Chick Corea des années 80. Musique assez exigeante que ces Three Quartets, auxquels le pianiste américain avait associé le merveilleux Michael Brecker au saxophone ténor. Trois saxophonistes, parmi les meilleurs que nous ayons en France, reprendront ce flambeau : David El-Malek, Rick Margitza et Stéphane Guillaume.
Kyle Eastwood de son côté, contrebassiste, leader de grands ou petits orchestres… et fils de Clint, rendra hommage au cinéma. C’est une vieille affaire pour lui que d’osciller entre ses deux passions et de faire défiler des images derrière sa musique. Compositeur pour certains films de son père, ré-arrangeur de bandes originales familières, il poursuit une carrière swingante et Cinematic, comme l’indiquait le titre d’un de ses derniers disques. Ana Carla Maza, elle aussi est une « fille de », celle de Carlos, musicien chilien exilé à Cuba où est née la jeune femme. Une formation classique de violoncelliste l’amène au Conservatoire de Paris, mais elle sait s’évader du monde classique pour créer son propre univers. Elle jongle avec sa voix et son instrument, retrouve dans l’un le grain de l’autre, et sourit à ses origines avec Caribe, son dernier album.
Enfin, Jazz à Ramatuelle propose de retrouver le quartet de Lars Danielsson, autre violoncelliste, mais le plus souvent porté vers la contrebasse. Il nous apporte la nostalgique précision du Nord, scandée par le batteur Magnus Öström (un rescapé du très illustre trio EST) et pimentée par le piano étincelant de Grégory Privat.
25 au 29 juin, Théâtre de Verdure, Ramatuelle. Rens: jazzaramatuelle.com
photo : Ana Carla Maza © Edu Rosales