L’été sera bleu ou ne sera pas…

L’été sera bleu ou ne sera pas…

« Il me faut un point de départ, ne serait-ce qu’un grain de poussière ou un éclat de lumière« , expliquait Joan Miró. Ce point de départ est celui de l’exposition inédite présentée au Musée Picasso d’Antibes, rassemblant des chefs-d’œuvre du virtuose espagnol issus de la prestigieuse collection constituée par l’homme d’affaires David Nahmad. 

Né à Barcelone en 1893, Joan Miró s’est imposé comme une figure centrale de l’art du XXe siècle. Après un début de carrière marqué par des compositions cubistes, puis une adhésion au surréalisme, son parcours artistique est animé par une quête incessante d’innovation, explorant une multitude de techniques et de supports, repoussant constamment les limites de l’expression artistique. Il arrive à Paris en 1920 et entame alors des relations amicales sincères avec de nombreux artistes pour autant de sources d’inspirations. Paris est à cette époque l’épicentre du groupe surréaliste, dans lequel l’artiste espagnol s’insère naturellement et évolue vers un monde onirique, magique, celui du rêve. C’est dans le corpus que l’artiste constituera au fil des ans, que l’exposition antiboise a pioché pour présenter pas moins de 12 œuvres magistrales du peintre des chimères, sélectionnées avec soin dans la collection Nahmad afin de rendre compte du génie Miró. 

Les salles, pensées autour d’une scénographie sobre et minimaliste, accueillent entre une et deux œuvres, ni plus ni moins. Il n’est pas question d’accumuler, mais de concentrer l’œuvre dans sa singularité, offrant ainsi les privilèges de la contemplation et l’interprétation au spectateur. Chaque pièce constitue un écrin bleuté dont le seul motif est la méditation ou un dialogue subtil entre deux chefs-d’œuvre. De fait, les conditions sont optimales pour le visiteur, jouissant d’une extase sans hésitation ni dispersion. Plus qu’une exposition, il s’agit d’une installation dans l’espace changeant des galeries du musée, pour une rencontre originale entre une œuvre et une architecture, lors d’un voyage inédit en douze étapes à travers l’exacte beauté de ces peintures. 

Cette collection Nahmad offre ainsi une immersion au cœur d’une œuvre où le rêve et la liberté d’expression gouvernent en maîtres. C’est pourquoi le peintre déclarait, au sujet de la couleur azuréenne, source d’inspiration de la majorité de son œuvre : « Ceci est la couleur de mes rêves« . L’exposition est une traversée de la grande bleue qui s’étend comme l’océan sur toute la toile, ponctuée de discrètes formes noires et rouges. Cette couleur offre ici un éventail d’interprétations, Miró nous laissant seuls juges de ce qu’il peut évoquer : le ciel, la mer, les songes ? À méditer… Plongés dans ces constellations imaginaires, nous n’avons plus qu’à poser le regard de toile en toile jusqu’à la Voie lactée. Joan Miró, dans son sillage céruléen, nous révèle « le sens magique des choses« .

Miró, chefs-d’œuvre de la collection Nahmad, Musée Picasso, Antibes. Rens: Rens: antibes-juanlespins.com
Miró, La Banque, musée des Cultures et du Paysage, Hyères. Rens: FBMuseeHyeres

photo : Joan Miró, Peinture (Femme au chapeau rouge), 1927 Huile sur toile /Oil on canvas, 130 × 97.2 cm © Collection Nahmad /Nahmad Collection