Anne Gérard, artiste à la mode

Anne Gérard, artiste à la mode

La mode s’est emparée de l’œuvre d’Anne Gérard, artiste niçoise dont les peintures ont attiré l’œil de deux créateurs qui ont conçu le site Artist Le Studio B&F, il y a 3 ans. Un concept d’art-à-porter, éthique et original, présentant des collections de vêtements uniques à partir d’une œuvre d’art. Une autre manière de (re)découvrir cette plasticienne niçoise qui imbrique l’intimité des lieux et objets du quotidien dans un travail jubilatoire sur le hasard et la couleur, dominante Pourpre dans cette collection.

Repérée en 2022 sur Instagram par ces stylistes à l’œil affuté et après une première collection à succès intitulée Barocco, une nouvelle collection d’Anne Gérard lui succède : Couleur Pourpre. « Nous sommes tombés amoureux de sa démarche artistique (…), la puissance de son imaginaire dégage quelque chose d’intense, une profondeur d’âme« . De l’art de faire et de défaire. La plasticienne, touche-à-tout, dessinatrice, coloriste, glaneuse d’objets, par sa manière de jouer des accidents dans sa pratique puis d’y revenir par le dessin et la peinture, nous ramène à notre âme d’enfant. Un rapport à l’enfance qu’elle entretient en enseignant à l’école municipale d’arts plastiques de Nice. 

Anne Gérard, Série « Les intérieurs » © François Fernandez

Couleur Pourpre est issue de la série Les Intérieurs (comme Barocco), cet espace « qui rassemble toutes nos contradictions« , dit-elle. Table joyeusement garnie, fenêtre ouverte sur la nature, rideau pourpre, châle oublié sur une chaise, Anne Gérard nous convie dans l’intimité d’une maison à l’atmosphère à la fois surannée et moderne. En résulte le paradoxe d’une ambiance « matissienne” que l’on aurait violentée, grattée, passée au lavis. Une technique parfaitement maîtrisée de mise à mal d’un dessin initial, confronté aux marques accidentées ou abandonnées lors du passage de la colle à papier peint. Hasard provoqué. « À chaque fois, j’ai l’impression de pénétrer dans une intimité qui n’est pas mienne, mais en même temps qui a quelque chose d’universel« . Les stylistes se sont emparés de détails, ou les ont recomposés par touches subtilement orientées vers l’abstraction, aboutissant à un vestiaire onirique et singulier.

Dès l’enfance, dessin et peinture ont été présents dans la vie d’Anne Gérard. Puis un passage « épreuve » à la villa Arson, tenue à l’époque par un esprit anti-peinture, et surtout machiste, période Christian Bernard. « L’art ne fait pas exception aux inégalités femmes-hommes« , constate-t-elle. Dans les années 2000, en réaction à un critique qui estimait son travail trop féminin (traduisez superficiel), elle initie un travail autour de la robe. « Je voulais prendre à contre-pied cette idée d’un art soi-disant féminin, en m’appropriant un des symboles de la féminité, et lui faire dire autre chose. (…) Dit-on à un artiste homme que ses œuvres sont trop masculines ? » Là est toute l’ambivalence de l’œuvre d’Anne Gérard, entre humour et insouciance, mélancolie et sourde violence dont il faut découvrir ses exquises séries, jamais closes. Sous l’apparente simplicité et douceur des motifs et matériaux choisis émerge un esprit joueur et frondeur, celui de l’enfance évidemment.

Rens: vente en ligne sur le site artist-le-studiobf.com

photo Une : Anne Gérard dans son atelier © DR