03 Sep Tout un week-end en Louisiane
Concerts, parades, messe… Après un Tremé Day en 2023, Villefranche-sur-Mer prend à nouveau des airs de Nouvelle-Orléans avec le 1er Tremé Jazz Festival, du 13 au 15 septembre prochain.
Tremé un nom bien français qui nous vient de Louisiane – celui d’un colon installé il y a trois siècles à La Nouvelle-Orléans pour faire prospérer sa plantation –, souvenir d’un colonialisme infâme, florissant grâce à l’esclavage, et qui paradoxalement a donné naissance à l’une des cultures les plus vivaces du XXe siècle. Le jazz est-il né à Tremé ? Ce quartier de la Nouvelle-Orléans en a en tout cas entendu les premières rumeurs, jouxtant le French Quarter, au cœur de cette Cité du Croissant. Et dans ce voisinage, cette musique peut encore se déployer. Musique pour touristes ? Musique pittoresque ? Certainement… Mais en même temps, c’est encore bien là qu’on la joue la mieux, que l’héritage y est le mieux préservé, qu’on est au plus près de ce qu’ont été les cultures noires et créoles depuis les années 1900. Villefranche accueille toute cette tradition le temps d’un weekend.
Avec de la musique d’abord, emmenée par James Andrews, parrain du festival. Trompettiste, danseur de claquettes, lié au jazz par d’innombrables liens de famille – car c’est d’une génération à l’autre que ces traditions se perpétuent –, il anime un orchestre dans lequel on retrouvera d’ailleurs son neveu Evon Andrews (trombone) qui reproduit la verdeur des sonorités louisianaises : improvisation collective des souffleurs, entre un cornet (les trompettes viendront plus tard), un trombone et une clarinette (plus fréquente qu’un saxophone…), la parade peut défiler. En effet, ce premier jazz est d’abord essentiellement un art de plein air, privilégiant des instruments qui portent, avec des basses à vent et des percussions qu’on s’attache à la taille. C’est tout un art de la batterie qu’on ne trouve que dans ces rythmes, dérivés du ragtime et propres à accompagner des marches, à la fois martiales et déhanchées. On défilera donc à Villefranche comme on le fait encore à La Nouvelle-Orléans, avec cette tristesse mêlée de jubilation qui est le propre des parades de deuil, remises à l’honneur, pour les musiciens, par ce même James Andrews. Et on pourra entendre la plupart des standards de cette musique, parfois revitalisés par le Rhythm’n Blues de Fats Domino ou les inventions de Dr John qui ont eux aussi irrigué cette mémoire.
Les souvenirs des Mardis gras et des Carnavals, où (presque) tout est permis, et la présence indienne si souvent occultée, seront également là, incarnés par un Big Chief AL en costume d’apparat extravagant, représentant la communauté des Black Indians, accompagné d’un brass band. Les Baby Dolls animeront quant à elle la fameuse Second Line : tout un public qui danse autour de la fanfare, toute une écume joyeuse virevoltant le long de la procession. Tandis qu’au « Village » : bijoux, pacotille, livres et souvenirs…
Et bien sûr, dimanche, à l’église Saint-Michel, se tiendra une messe gospel, dont les voix oscillent entre l’angélisme et la chair, dont les appels et les témoignages évoquent la transe et l’espoir d’une rédemption jamais certaine, toujours possible : « Oh Lord!…«
13 au 15 sep, lieux divers, Villefranche-sur-Mer. Rens: FB TremeDay
photo : James Andrews, parrain du festival, lors du Tremé Day en 2023 © DR