Festival In&Out : born to be alive !

Festival In&Out : born to be alive !

La biennale Liberté + In&Out, renommée Festival In&Out, est l’événement LGBTQIA+ qui s’imposait en ces temps où le respect de l’autre dans toutes ses différences doit plus que jamais être entendu et accepté. Événement hybride mêlant spectacle vivant, cinéma, rencontres et débats, il innove dans sa rencontre entre une scène nationale (Châteauvallon-Liberté) et une association (Les Ouvreurs), et sa thématique : la défense des personnes et des cultures Queer. A l’aube de cette 3e édition, du 18 au 30 novembre à Toulon, nous avons échangé avec Benoit Arnulf, coordonnateur des Ouvreurs.

En 2020, Le Liberté et Les Ouvreurs s’associaient pour proposer juste avant la 1e gay pride toulonnaise, la bien nommée Marche des fiertés, la 1e édition d’un nouveau festival pour lutter contre les LGBTphobies : Le Liberté+In&Out était lancé. 

S’activer dans le réel

Benoit Arnulf œuvre sur le terrain depuis sa jeunesse. Formateur, intervenant spécialisé (sexualités, et discriminations liées aux sexualités), ce désenchanté de la politique a décidé d’en faire autrement : par l’action. Il est à l’origine avec son association de la création du Réseau éducatif contre les LGBTphobies de l’Académie de Nice aux côtés du CRIPS SUD, d’un festival de cinéma – In&Out à Nice (depuis 2009), à Cannes (depuis 2012) et donc à Toulon (depuis 2020) – et de nombreuses activités de sensibilisation en milieu scolaire et de formations auprès d’adultes sur les questions de discriminations, LGBTphobies et sexualités. Élu Président de la Fédération Française des Festivals de Films LGBTQIA+, qu’il a contribué à créer, il est une des figures emblématiques de la cause Queer en région Paca (voir article La Strada n°364).

La lutte par la Culture 

La diffusion des cultures Queer par le cinéma et le spectacle offre un socle d’échange essentiel avec le grand public, en parallèle avec l’angle plus politique des luttes contre les violences sexistes et LGBTphobes. À Toulon, un palier supplémentaire est franchi. « Cette Biennale, j’en suis très fier. La rencontre avec Le Liberté s’est faite par la plus belle des façons : le projet Courts-métrages en Liberté monté par les équipes de Charles Berling avait chaque année une thématique sociétale, ils avaient besoin d’une personne versée sur les questions des LGBTphobies« , détaille Benoit Arnulf. « Le concept était de faire réaliser des films par des jeunes d’origine et d’horizons assez différents (écoles, quartiers, ou sous surveillance judiciaire). J’ai rencontré Sophie Catala qui est toujours mon interlocutrice au Liberté. Cinq films ont été faits, très beaux, je les ai programmés à Nice, Berling est venu. Puis ce projet a pris fin et on a réfléchi ensemble. Il n’y avait rien sur la question de la Culture Queer et la lutte contre les discriminations LGBTQIA+ à Toulon. Ils ont dit bingo et notre association a démarré là : un mélange hybride de cinéma et de spectacle vivant pour créer aussi un espace d’échanges et de discussions sur ces questions complexes et souvent mal abordées par les médias généralistes« .

Océan et Paul B.Preciado à l’affiche

Un artiste détonant prend le pas cette année selon Benoit, c’est Johanny Bert avec son théâtre de marionnettes. Surprenant ? Oui, mais quand vous verrez ses deux spectacles : Hen et La (Nouvelle) Ronde, vous comprendrez combien la « non-conformité » de cet artiste est salvatrice !

Deux autres grands invités mettront en lumière la question de la Transidentité. « C’est vraiment le sujet actuellement. Pas mal de gens essaient de faire rentrer ces questions dans la norme. Or, on est là pour faire bouger les lignes et c’est intéressant de donner la parole aux artistes comme Bert qui parlent aussi de qui ils sont« . C’est le cas d’Océan, réalisateur, humoriste qui va présenter son film tiré de la première saison de sa websérie éponyme réalisée pour la plateforme France TV. « Ce film parle de son rapport à la famille dans ce moment de transition, il est très émouvant« . Il avait fait deux films dans sa première vie artistique sous le nom d’Oceanerosemarie avant d’entamer sa transition. Une rencontre aura lieu pour parler aussi de son livre autobiographique Dans la cage

La venue du philosophe Paul B. Preciado est aussi un événement : « Il est pour moi l’une des plus grandes voix et un des plus grands esprits sur la question de la transidentité, qui travaille le fait majoritaire, le système normatif général – qui pour le coup concerne tout le monde. Les personnes trans sont au centre d’un combat idéologique entre réactionnaires et progressistes majeur dans la société« . Il présentera son film Orlando, ma biographie politique, déjà diffusé sur Arte, plébiscité par la critique, mais freiné par certains diffuseurs en salle… 

Cette biennale, ce sera aussi des spectacles de haut vol (Femelles et Débandade) et du cabaret avec Les 12 travelos d’Hercule en petit comité, parfaitement drôle, qui auront carte blanche pour célébrer la Nuit Liberté, avec Dj Rapzouz et La Mulette. Autre lieu festif et rassembleur, le Maz, un bar-restaurant devenu « un lieu refuge » où viennent des publics très différents, qui s’est ouvert aux spectacles trans, accueillera une soirée Dance Floor.

Toucher les jeunes, une priorité

« L’action auprès des jeunes, c’est une des raisons qui m’ont rapproché du Liberté« . Elle s’incarne dans le spectacle d’ouverture : Normal ! de la Cie de l’Echo représente tout ce que Benoit attend du festival, ici « pensé aussi comme un espace pédagogique. La compagnie a voulu être formée, je les ai aussi accompagnés en milieu scolaire pour présenter leur spectacle. J’adore quand j’arrive à allier à la fois mon travail de médiateur et de sensibilisateur, et là c’est l’aboutissement« . Plusieurs programmes sont prévus pour les scolaires et les jeunes, la question trans chez les mineurs bouscule les mentalités, « on en parle davantage, mais pas forcément bien« . C’est ce genre de sujet que le festival peut aider à faire comprendre et accepter. 

Penser à l’avenir…

Cette biennale est assurément un acte politique fort. La ville a connu, depuis la sortie de son ornière néfaste d’extrême droite (1984-1999), une métamorphose architecturale, sociale, et culturelle considérable, et le Théâtre Liberté faisait partie de sa renaissance. À l’aune des prochaines échéances électorales en 2026, « nous sommes inquiets pour l’avenir« , confie Benoît Arnulf. Les multiples agressions subies lors de la Marche des Fiertés lancée en 2020 par le Collectif Fierté, et instrumentalisées politiquement, en sont un des signaux alarmants et navrants.

18 au 30 nov, Théâtre Liberté & lieux divers, Toulon. Rens: chateauvallon-liberte.fr, lesouvreurs.com

photo : Kori Ceballos dans Orlando, ma biographie politique de Paul B. Preciado © Salzgeber & Co. Medien GmbH

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