L’art urbain s’invite à l’hôpital

L’art urbain s’invite à l’hôpital

Depuis 2020, près de 50 fresques monumentales ont vu le jour, grâce au festival international d’art urbain Coul’Heures d’Automne. De quoi inscrire la cité azuréenne parmi les capitales françaises du street art. Pour sa 6e édition, du 18 octobre au 1er novembre, l’événement prend un tournant inédit : c’est au cœur du Centre hospitalier d’Antibes que les artistes viendront dialoguer avec le public.

Le choix du site n’est pas anodin. En cette année placée sous le signe de la santé mentale, le festival fait résonner création et soin. L’hôpital, lieu de vie partagé par soignants et patients, devient ainsi un espace artistique à part entière. Pendant 15 jours, six artistes internationaux investiront six façades majeures du site. Chaque fresque, reflet d’un regard singulier, ouvrira une fenêtre d’imaginaire et d’évasion au sein du quotidien hospitalier.

Cette orientation s’inscrit dans la continuité de l’esprit du festival, porté par l’association Label Note et son directeur Sébastien Hamard : fédérer habitants, visiteurs et institutions autour de l’art urbain. Déjà en 2022 et 2023, La Strada relevait combien Coul’Heures d’Automne avait su transformer la ville en galerie à ciel ouvert, suscitant autant la curiosité des passants que l’adhésion des riverains. Cette fois, c’est le lien entre art et santé publique qui s’impose comme fil conducteur.

Six artistes, six visions

Parmi les invités, la Néerlandaise Judith de Leeuw (alias JDL) apportera sa touche poétique et puissante sur le bâtiment psychiatrie. À 27 ans, cette figure montante du street art a déjà peint dans plus de 40 pays, exposé aux côtés de Banksy et Keith Haring, et même été invitée au Palais royal des Pays-Bas. Son parcours personnel, marqué par une enfance en foyer, nourrit une œuvre profondément empathique, qui rend visibles les fragilités et les oubliés.

Sur les autres façades du bâtiment psychiatrie : deux autres artistes. Le muraliste Li Hill, Américano-Canadien basé à Londres, fusionnera graffiti, peinture murale mexicaine, calligraphie chinoise et photographie en pose multiple. Ses œuvres, exposées de Melbourne à Berlin, interrogent l’identité et la complexité des récits modernes. Quant au Chilien Javier Barriga, il proposera des compositions figuratives nourries de tradition, où des silhouettes féminines mystérieuses, drapées de robes délicates, éveillent une émotion subtile, entre clair-obscur classique et intensité contemporaine.

L’artiste sud-africaine Ellena Lourens, née au Cap et aujourd’hui installée à New York, interviendra à proximité des urgences. Ses fresques, mais aussi ses créations textiles et picturales, explorent les états émotionnels par des formes symboliques et des gammes chromatiques subtilement choisies.

L’Espagnol Slim Safont, diplômé des Beaux-Arts de Barcelone, apportera son réalisme critique en gériatrie. Cofondateur de l’espace indépendant Malpaís, il propose des fresques monumentales où portraits et paysages révèlent les enjeux sociaux contemporains.

Enfin, deux Français seront de la partie : Rouge Hartley, diplômée des Beaux-Arts de Bordeaux, marquera l’entrée principale de l’hôpital de son univers romantique et pictural, tandis que le Niçois Otom, issu du graffiti et passionné de BD, réalisera une fresque XXL au pied du Carrefour d’Antibes.

Ça déborde des murs

Au-delà des fresques hospitalières, Coul’Heures d’Automne se déploiera en ville et en périphérie : l’artiste parisienne Olivia de Bona interviendra sur le M.U.R d’Antibes, rue Miquelis, avec une œuvre nourrie de nature et de féminité, et le graffeur antibois FREE réalisera une « œuvre roulante », puisqu’elle sera peinte directement sur un bus-tram de la ligne A !

Comme chaque année, La sChOOL, centre d’art urbain et musical de l’association Label Note, restera le poumon du festival. La traditionnelle exposition collective Ici des artistes ont fait le mur mettra en lumière six talents azuréens : William Hamer, Nekoff, Meuckah, Leny Tusfey, Guitou Top Gun et Jeremy Lorenzato. Et une autre exposition, consacrée à l’artiste Ma2thieu Long, restera visible jusqu’au 20 décembre.

Événement participatif, Coul’Heures d’Automne propose également des ateliers gratuits pour s’initier au graffiti à La sChOOL, et au concept des Coul’Box à l’hôpital. Petits et grands pourront ainsi rencontrer les artistes et expérimenter leurs techniques. Des visites guidées inviteront par ailleurs le public à parcourir les œuvres disséminées en ville, retraçant ainsi l’évolution d’Antibes comme galerie à ciel ouvert.

Côté festivités, les soirées d’ouverture et de clôture, les 18 octobre et 1er novembre à La sChOOL, mêleront graffiti jam, concerts live et DJ sets. Une journée de clôture se tiendra également à l’hôpital, avec l’inauguration officielle des fresques.

L’art urbain, une respiration

Antibes franchit donc une nouvelle étape. L’intégration du festival au cœur du Centre hospitalier rappelle combien l’art peut contribuer à la santé publique : il apaise, inspire, redonne souffle et couleurs à des lieux souvent associés à la gravité. Fidèle à sa vocation, l’événement continue de faire dialoguer les mondes – celui de la rue, celui du soin, celui du quotidien – et démontre que, décidément, ces Coul’Heures d’Automne sont bien plus qu’un simple festival international d’art urbain : une expérience collective, sensible et nécessaire.

18 oct au 1er nov, lieux divers, Antibes Juan les Pins. Rens: coulheures.fr

photo: Rouge Hartley © Pierre Planchenault

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