Un monde si fragile

Un monde si fragile

… tel est le titre de l’exposition que (re)présente la Maison de la photographie de Toulon. En conservant ce titre, elle a vu juste : un thème plus que d’actualité, sous le regard d’un artiste à l’engagement plus que précieux, Pierre-Jean Rey.

Né à Toulon, exposé à Toulon… Juste retour des choses pour le photographe, scénariste et documentariste Pierre-Jean Rey (voir article La bonne distance focale, publié le 24 juin). L’exposition Un monde si fragile, à la Maison de la photographie de Toulon, rend hommage à 50 ans de travail. « Cette exposition marque les différentes étapes de ma vie photographique, qui s’est orientée au fil des rencontres« , précise Pierre-Jean Rey.

À 23 ans, Pierre-Jean Rey suit les enseignements photographiques de Jean-Pierre Sudre, Jean (Yan) Dieuzaide et Denis Brihat. Une sacrée trinité ! « J’ai été très influencé par ces trois maîtres, et notamment Denis Brihat dont j’ai été l’assistant« , poursuit Pierre-Jean Rey. Ces trois maîtres ont en commun la recherche de techniques, procédés et de mélange de matières. De quoi renforcer la vocation de Pierre-Jean Rey qui se lance à son tour dans les virages et les oxydations. « J’ai créé des « tableaux », j’ai mélangé différentes techniques argentiques apprises avec eux. »

Comme ses trois « parrains », Pierre-Jean Rey opte pour l’enseignement, et officie aux Beaux-Arts de Toulon. Puis il effectue un premier virage: « J’ai rencontré la créatrice de la marque Chakok à Biot, Arlette Dekock. J’ai réalisé une première une série sur la collection et suis resté pendant quatre ans leur photographe attitré. » Pierre-Jean Rey crée par la suite les studios Baobab, à Toulon, bien sûr, puis à Paris.

En 1992, nouveau tournant décisif, avec un thème de prédilection : l’enfance et la protection de ses droits. Pierre-Jean Rey s’engage dans la réalisation de documentaires, dédiés à la jeunesse en détresse, et multi primés. « À partir du premier documentaire, il y a eu un décalage et je n’ai plus eu envie de travailler dans la mode et la beauté, mais d’aider les associations humanitaires, dont l’Unicef, notamment avec la journaliste Claire Brisset, défenseure des droits de l’enfant à l’époque. » À l’occasion des 20 ans des droits de l’enfant, en 2009, Pierre-Jean Rey publie Petits d’Hommes, 2e édition, chez Albin Michel. Ce livre donnera entre autres naissance à une exposition itinérante durant trois ans, dans douze pays, dont la Tunisie, l’Inde, le Maroc, le Brésil… « Dans ce 2e ouvrage, qui a aussi très bien marché, chaque enfant savait pourquoi il était photographié. J’ai réalisé des cadrages très serrés, pour saisir le regard. Pour la photo de l’expo, cette bulle de savon symbolise ce monde très fragile. »

Au cours de ces 50 ans de travail, Pierre-Jean Rey a collaboré avec des personnalités du monde entier comme Marcel Ruffo, pédopsychiatre, ou Bernard Giraudeau, l’un des fondateurs des Rencontres de la photographie d’Arles. « Fin 2016, j’ai arrêté de faire des photos« , confie Pierre-Jean Rey. « Je n’en ressens plus le besoin. Je fais de « fausses » photos, pour moi, tous les jours, mais que je ne montre plus ! » L’artiste a ouvert la Galerie 15, galerie associative privée, la seule à Toulon. « J’ai beaucoup bourlingué, la photo me passionne toujours, mais je veux désormais rendre hommage au travail des autres. »

La galerie expose photographes connus et « débutants », en résidence à Toulon pendant deux mois. « C’est une très belle réussite. Parmi les jeunes photographes, l’architecte iranienne Aïda Ganjipour, a réalisé un travail considérable, et a vendu 35 photos, ce qui est un grand succès. Olivier Placet signe la première expo de réouverture avec Matéria » (visible jusqu’au 1er août). Des visites commentées de l’exposition Un monde si fragile sont possibles sur inscription. Une belle façon d’en apprendre davantage sur Pierre-Jean Rey, artiste humaniste.

Jusqu’au 26 septembre, Maison de la Photographie, Toulon. Rens : toulon.fr
(photos : 1- Un monde si fragile © Pierre-Jean Rey, 2020 / 2- Pierre-Jean Rey © DR)