Nos vies à la petite semaine

Nos vies à la petite semaine

C’est un bad birthday que chacun d’entre nous n’a pas envie de souhaiter. Il, ou plutôt elle, puisque l’on parle de la maladie Covid-19, a fait irruption dans nos vies à des jours plus ou moins différents selon notre localisation géographique, notre soumission aux grands médias, nos croyances intimes et bien d’autres facteurs personnels. Minimisée par certains ou amplifiée dans le discours d’autres, pour la majorité d’entre nous, nous n’avons d’abord pas vraiment compris ce qui était en train de se produire. 

Nous pouvons toutefois tous nous mettre d’accord pour dire que nos vies ont basculé en France un certain 17 mars 2020. Surpris, perdus, nous avons mis en place les premières mesures d’auto-protection pour nous adapter à cette situation totalement inattendue. Beaucoup ont fait preuve d’imagination pour faire face à ce nouveau quotidien qui nous était imposé dans les grandes lignes. Ces deux mois ont souvent été l’occasion de remises en question personnelles alors que le rythme furieux de la vie s’est soudainement arrêté. Seul(e) face à soi-même, l’heure n’était plus aux faux-semblants. Beaucoup ont redécouvert le charme de la simplicité, la beauté de ce qui nous entoure tandis que la nature semblait reprendre ses droits. On s’est mis à rêver le monde d’après…

Les mois ont passé et tandis que plane la menace d’un troisième confinement, où en sommes-nous aujourd’hui? Les plus optimistes décrèteront que nous avons avancé grâce au vaccin. Mais nous, en temps qu’individus, où en sommes-nous? 

Nous démontrons depuis près d’un an une magnifique capacité d’adaptation. Alors qu’auparavant nous planifions nos journées, nos week-ends, nos vacances, notre futur, nous nous retrouvons à vivre à la petite semaine. Notre vie est désormais ponctuée par les annonces gouvernementales dont certaines sont attendues avec plus d’impatience que d’autres. C’est que nous sommes désormais soumis à de nouveaux rituels : les bruits qui courent avant l’heure permettant de se préparer au mieux aux nouvelles exigences des jours à venir. Telle la vague qui vient battre la plage, notre quotidien est soumis à un va-et-vient régulier dont la fréquence est donnée par les décisions annoncées officiellement, provoquant des périodes de grandes agitations en alternance avec des accalmies temporaires, laissant à chacun de leurs passages de nouveaux sillages sur nos vies. Couvre-feu, attestation, confinement, isolement sont devenus le vocabulaire de base d’une vie que l’on pensait appartenir définitivement au passé, à l’histoire.

Dire où nous en sommes aujourd’hui semble impossible tant le virus semble jouer avec notre humanité. Alors, pourquoi ce texte ? 

Simplement pour dire mon espoir en l’individu, en sa faculté de s’adapter, de se recréer. Nous vivons une période inédite et elle ne sera pas vaine, car notre regard sur demain ne pourra plus être identique à celui que nous avions dans l’Ancien Monde. Bien sûr, nous avons tous des moments de doute, de tristesse, et des maux bien plus profonds pour certains. Pourtant, il nous faut plus que jamais « cultiver notre jardin », avec espoir et bienveillance, inlassablement. Viendra un jour où nous regarderons tout cela comme un mauvais souvenir, mais ce que nous avons vécu ne vaudra la peine d’avoir été vécu que si nous parvenons à en tirer les conséquences pour avancer. Notre vie est rythmée depuis trop longtemps par la notion de toujours plus ; l’heure est venue de se penser un avenir guidé par la notion de toujours mieux.