Cie Reveïda : la danse contemporaine se réinvente dans le regard des enfants

Cie Reveïda : la danse contemporaine se réinvente dans le regard des enfants

C’est au début des années 2000 que Delphine Pouilly fonde la Cie Reveïda dans la foulée d’une formation professionnelle qui l’a conduite à expérimenter les techniques de danse contemporaine auprès de chorégraphes comme Carolyn Carlson à Paris ou Susan Buirge dans la célèbre Abbaye de Royaumont. Mais au fil du temps, elle se rend compte que c’est être avec les enfants qui fait qu’elle se sent bien : « C’est un vrai bonheur d’entendre leurs éclats de rire, leurs réflexions ». Si bien qu’en 2010, Delphine Pouilly, décide de donner un nouveau tournant à sa compagnie et se spécialise dans la danse contemporaine à destination du jeune public.

Bienvenue aux adultes non-accompagnés

Bien sûr, la naissance de ses enfants n’est pas un hasard dans ce choix : ils sont devenus une source d’inspiration tout autant qu’ils ont entraîné une réflexion nouvelle chez la chorégraphe en l’aidant à déterminer ce qu’elle aimerait offrir en terme artistique au jeune public. Cette attirance pour une forme de création à destination des plus jeunes a toujours été présente dans son processus créatif à l’exemple d’Alice au pays des merveilles, l’une des toutes premières pièces de la Cie Reveïda.

En parallèle, la richesse artistique dont Delphine Pouilly entoure chacune de ses créations, permet différents degrés de lecture, chaque spectateur, quel que soit son âge, pouvant trouver des réponses à ses propres préoccupations. Elle aime rappeler que ses spectacles sont « autorisés aux adultes non-accompagnés » !

Chaque pièce est minutieusement travaillée en amont afin d’aborder une thématique spécifique sous des angles à la fois ludiques et esthétiques. Dans Esperluette danse avec la peau des mots, un poète culinaire invite le public à savourer le goût des mots et à déguster la lecture sans modération. Avec Le Kaléidoplastique Quizz, l’art est abordé sous la forme d’un jeu orchestré par un présentateur déjanté. Quant à La Constellation des petits pois, l’exploration des mystères de l’univers est confiée à un scientifique tout aussi loufoque qu’émérite.

Pour ses créations, Delphine Pouilly est entourée d’une fidèle équipe parmi lesquels on retrouve le comédien Olivier Debos, les danseuses Jeanne Chossat et Morena Di Vico, la plasticienne Pascale Breysse et la musicienne Pascale Heinisch. Sa prochaine création, Nous n’irons plus au bois, se révèle plus intimiste puisqu’elle sera seule sur scène en compagnie de Pascale Breysse qui produira des dessins en live.

L’appel de la forêt

La dernière création de Delphine Pouilly a pris des détours inattendus dans le contexte actuel, nécessitant des adaptations auxquelles l’artiste fait face, car après tout, elle « aime le voyage de la création sans forcément savoir quelle sera la destination ». Dans cette fable écolo-fantastique, basée sur l’univers du conte, la forêt tient le rôle central. Son objectif est de sensibiliser le public sur les problèmes écologiques sans pour autant vouloir porter un discours moralisateur. « Notre terre n’est pas inépuisable. Il faut être attentif à notre manière d’appréhender le monde et agir. »

Conçue initialement pour la scène, Delphine Pouilly s’interrogeait, dès les débuts du projet, sur la possibilité de décliner cette création pour d’autres lieux. C’est ainsi que depuis mars 2020, cette envie est devenue une nécessité : Nous n’irons plus au bois se présente désormais sous un second opus, Habiter le monde. La création initiale prend de nouvelles formes en extérieur en s’adaptant aux lieux, de façon parfois surprenante comme, lorsqu’en octobre dernier, elle s’installe dans la Grotte du Baume Obscur à l’occasion des performances souterraines, juste avant le deuxième confinement.

Sous l’impulsion de Jean Flores, l’emblématique directeur du Théâtre de Grasse, et dans le cadre de son projet Par les villages, visant à conserver une dynamique culturelle malgré la fermeture des théâtres, la chorégraphe a également imaginé des Défis-danse en lien avec sa création. L’idée était de filmer une action dansante répondant à un thème (l’arbre qui danse, les êtres de la forêt…), l’ensemble des scènes composant au final un Objet artistico-poético-chorégraphique.

Actuellement, elle développe les ateliers en extérieur avec les enfants, notamment par le biais de sa très forte implication dans la démarche d’Éducation Artistique et Culturelle (EAC). Pour nous spectateurs, il nous faudra encore attendre de nombreuses semaines avant de pouvoir enfin découvrir la version scénique de Nous n’irons plus au bois qui ne demande qu’à partir à la rencontre de son public.

(photo Une : Delphine Pouilly dans Habiter le monde © Nathalie Sternalski)