07 Sep Bleu intense
Mohamed Rezkallah nous offre aujourd’hui ce roman/délire qui parle du quotidien, de torture, de dualité… Auteur ô combien prolifique, sa production suit le rythme des nouvelles et des catastrophes comme une chronique de « l’effondrement » qui semble bien entamé.
L’après-Covid… Un monde convalescent, à fleur de peau, en désordre… Quand Mo tombe fortuitement sur une cliente au sortir de la douche, dans une chambre d’hôtel qu’il croyait inoccupée, sa vie bascule. Propulsé dans un des microcosmes de la nuit, il se perd, lui qui, pourtant, croyait si bien les connaître. Un univers pulsionnel qui le catapulte vers les situations les plus absurdes, les plus abjectes, vers les rêves éphémères les plus fous… Son âme en perdition se débat, son corps cède à l’instinct de survie… Au petit matin, après une nuit de folie, il se découvre étranger à lui-même, se demande quel ange démoniaque s’est joué de lui… Impression très fugace… Car lorsque le soleil du matin inonde la baie de ses rayons, Mo comprend qu’il n’a jamais été autant lui-même que cette fameuse nuit.
Rezkallah qualifie lui-même cet opus de « roman total« , car il va là où personne ne veut s’aventurer en jonglant avec le style, tout en souplesse. Il est question ici de sexualité, de torture, de déchéance, de descente aux enfers, mais aussi d’amour, car pour lui c’est dans la douleur et dans l’autodestruction que l’on touche à la vérité de soi. « Dans le chaos, la souffrance, la douleur, la survie, nous sommes instantanément, et sans le moindre effort, connectés à l’hu-manité. L’amour et la compréhension apparaissent comme des moments d’accalmie qui rassemblent les peuples le temps d’une fête, d’une cérémonie, puis la violence et la souffrance, le manque, reviennent pour équilibrer et garder l’humanité à sa place. Le malaise de notre civilisation est arrivé avec les technologies, le confort, le bien-être. De-puis que nous n’avons plus besoin viscéralement les uns des autres. Et mes personnages savent que c’est trop tard, mais ne renoncent jamais à leur humanité.«
Plutôt que des essais philosophiques, des textes d’experts, Mohamed Rezkallah a choisi la forme romanesque, car elle lui donne toute la liberté dont il a besoin pour se mettre à nu. « Quant au trash, dans cette époque où la violence est banalisée, où l’on nous bom-barde d’images, de sons, d’infos, il n’est qu’un artifice pour transpercer l’opacité dans laquelle est enfermé le lecteur. »
Bleu intense de Mohamed Rezkallah (éditions Sell hope)