
25 Jan Guillermo Guiz, prince de l’humour noir
Chroniqueur dans La bande originale de Nagui, sur France Inter, Guillermo Guiz est devenu le prince du stand-up après un parcours aussi atypique que son humour. Il présentera son spectacle Au suivant ! à Carros, le 17 février prochain.
Guy Verstraeten – patronyme nettement moins classe que Guillermo Guiz, et c’est lui qui le dit ! – est né à Etterbeek, en Belgique. Élevé seul, dès l’âge de 3 ans, par son père dans le quartier populaire d’Anderlecht à Bruxelles, il perd sa mère, avec qui il n’avait plus beaucoup de contact, alors qu’il n’a que 17 ans. En fait, s’il a choisi l’humour, c’est pour panser ses blessures, pour dévoiler ses failles avec une autodérision libératrice. Adolescent, il manque une carrière de footballeur professionnel pour cause de blessures. Après un an en Espagne, il entreprend des études à Sciences Po, suivies d’une formation de journaliste. Ça lui permet de « piger » dans des journaux pour le moins très différents : Le Soir, Trends-Tendances, Foot Magazine, Le Monde Diplomatique…. Entre 2010 et 2013, il est patron de boîtes de nuit à Bruxelles, qui toutes font faillite. Ces multiples échecs, une rupture difficile, et la découverte du stand-up américain, qui font de sa vie une véritable blague belge, le poussent à tenter sa chance en tant qu’humoriste.
La transmission en fil rouge
Sur scène ou à la radio, son écriture est essentiellement introspective et joue sur l’autodérision : il ridiculise son vrai prénom, Guy, raconte sa jeunesse à Anderlecht, où trône la statue de Jean-Claude Van Damme, et aborde volontiers des sujets sensibles comme la drogue, l’alcool, les religions ou le viol. On peut par exemple l’entendre dire un truc du genre : « Qui aime le plus les animaux, finalement : les zoophiles ou les chasseurs ?«
C’est de sa passion pour la philosophie que proviennent les questions métaphysiques qui transparaissent dans certains de ses sketches. Ce célibataire s’interroge sur une éventuelle paternité. Alors, forcément, il revisite ce que lui a légué son père, chômeur endurci, bourré de certitudes, aimant l’alcool et les cigarettes, détestant les curés et donnant des conseils foireux : « Ne pisse pas pendant un orage, tu vas t’électrocuter« . Grâce à ce fil rouge de la transmission, Guillermo Guiz, avec son allure juvénile de beau gosse, au débit de mitraillette et à l’accent belge attachant, parvient à embarquer le public dans des souvenirs autobiographiques hauts en couleur et dans des questionnements habiles sur la virilité et la masculinité. Il joue avec humour la rancœur contre « la France qui a volé la coupe du monde aux Belges« . Il peut être grinçant, mais toujours avec fun, il déteste le point de vue français sur les Belges pris pour des cousins francophones « attardés » ou pour des terroristes depuis le Bataclan : « Pour la Belgique, c’est un drame d’être assimilée au terrorisme… On a tant de pédophiles merveilleux« … Guillermo Guiz, ou comment énoncer crûment de belles choses, tel un Jean Yanne ou un Desproges avant lui ! La rapidité du monde connecté en plus.
17 fév 20h, Salle Juliette Greco, Carros. Rens: forumprevert.com
(photo : Guillermo Guiz © Philippe Mazzoni)