[Spécial femmes] Panache… Ultra plastique !

[Spécial femmes] Panache… Ultra plastique !

Quand le stylisme devient une discipline plastique, le vêtement se fait œuvre qui s’expose sur les corps, tous les jours. Aïcha Hamu et Isabelle Rey ont créé la marque Ultra Panache. Ou quand liberté de création rime avec liberté féminine…

Il est des platisciennes et plasticiens qui, de nos jours, évitent l’enfermement d’une certaine vision très 80’s de l’art contemporain en France. Ils n’hésitent pas à étendre leur démarche plastique à des créations qui correspondent à d’autres modes de diffusion que le « white cube », ces murs blancs et codes que l’on connaît pour une exposition « traditionnelle ». Au Québec, par exemple, si les images, les formes qu’ils exposent conviennent à des « clients », ils les diffusent ensuite, car leurs créations servent à donner une image autre à une marque. En fait, que l’on parle d’art appliqué ou d’art contemporain pur, d’architecture d’intérieur ou de design, de vidéo ou de web, tous les réseaux sont utilisés pour diffuser les créations.

Aïcha Hamu et Isabelle Rey ont opté pour ce type de démarche, et loin de stopper leur parcours de plasticiennes contemporaines, ou leurs expositions, elles se sont retrouvées à œuvrer sur le corps. Aïcha est une plasticienne qui crée des installations, parfois assez imposantes. Isabelle utilise le collage, l’intime et les créations de plus petites dimensions. De leur travail sur le corps est née l’idée de créer une collection de vêtements très particulière. Le vêtement n’est-il pas une manière de parler du corps en passant par un autre média que l’exposition ?

Depuis 2018, elles travaillent ensemble aux créations d’Ultrapanache qui évoque un univers graphique et structuré, sobre ou flashy, auquel les deux artistes plasticiennes formées à la Villa Arson n’ont pas franchement ré-fléchi. Leur ligne de conduite : « Un geste simple et la culture du no waste, le moins de chutes possible. » Une silhouette structurée, mais décontractée, avec souvent, en fil rouge, des épaules larges et marquées « signe de personnalité affirmée… »

Pas de business plan en revanche, et encore moins d’études de marché chez ces deux-là. Elles fabriquent à la main, selon l’inspiration : un tissu, un film, un artiste, un détail… Puis les deux couturières autodidactes testent, dessinent, modèlent, patronnent, assemblent. D’ailleurs, elles taillent en fonction de leurs deux gabarits très différents. « Si ça tombe bien sur chacune, ça tombera bien sur tout le monde ! » Elles travaillent au feeling, et se préoccupent de leur empreinte carbone. « On s’est rendu compte que même avec les vêtements de créateurs, tout était fait à l’autre bout du monde« , déplorent l’Avignonnaise et la Lyonnaise, arrivées à Nice pour leurs études. C’est bien pour cela qu’elles travaillent avec des fournisseurs de la région : Tessutti à Saint-André de la Roche, Wonderland à Nice. « On récupère des fins de rouleaux, des lots en mercerie aussi. Et c’est le tissu qui nous guide. On utilise les caractéristiques de la matière pour dessiner la forme du vêtement sur le corps« , encore une preuve de la démarche plastique délibérée de ces stylistes atypiques.

Des modèles qui vont évoluer en fonction des étoffes disponibles et des envies d’Aïcha et Isabelle, habituées à manier les volumes et les matières, les assemblages et les compositions dans leur autre vie de plasticiennes. Le travail « plastique » d’Aïcha Hamu est par ailleurs visible au MAMAC, à Nice, dans le cadre de l’exposition Histoire.s de l’œil, jusqu’au 29 mai. Elle y dialogue avec les collections du musée niçois. Elle prépare aussi un « 1% artistique » pour le Collège Frédéric Mistral, à Arles. À suivre…

Rens : ultrapanache.com

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