Voyage en Italie : Urbino, ville idéale ?

Voyage en Italie : Urbino, ville idéale ?

À quelques heures de Nice, dans une région méconnue des Français, Les Marches (prononcez Lé marké), se trouve un petit paradis terrestre aux paysages vallonnés et verdoyants qui n’est pas sans rappeler ceux de la célèbre Toscane. La Strada, en partenariat avec la Chambre de commerce italienne de Nice, vous invite à découvrir Urbino, cité médiévale où naquit le peintre Raphaël, et qui a su faire de son passé prestigieux une force d’attraction pour une population jeune qui lui donne un charme fou.

Le temps semble être arrêté depuis la Renaissance sur Urbino, située au cœur des Marches et dominant la mer Adriatique. La cité rayonne discrètement au sommet d’une colline dans un paysage hors du temps. Ici, étonnamment pas de tourisme de masse. De l’avis de beaucoup, Urbino est comme une « petite Florence » qui aurait gardé toute son authenticité. Ayant (provisoirement ?) échappé aux hordes de touristes, celle que l’on surnomme aussi « la perle de la Renaissance » ne s’est donc pas « muséifiée », quand bien même elle compte, depuis 1998, au nombre des sites du Patrimoine mondial de l’UNESCO.

Berceau de la Renaissance

La renommée d’Urbino vient d’une famille : les Montefeltro, et plus précisément de son duc Federico da Montefeltro. Homme de grande culture, passionné d’architecture, il conçut l’idée d’une « cité idéale et rationnelle, bien protégée, riche, tournée vers les arts et le bonheur. » C’est ainsi qu’est né le palais ducal d’Urbino, 440 000m² répartis sur six étages, considéré comme l’un des grands joyaux architecturaux de la Première Renaissance. La ville s’est organisée autour de cet édifice incroyable qui nécessite plus d’une journée pour en apprécier la démesure et l’inventivité de ses créateurs. Petit retour en arrière…

Urbino fut l’un des principaux pôles de la culture italienne du XVe siècle et le centre d’une cour raffinée. Le divin Raphaël (1483-1520) était le fils d’un peintre renommé de la ville. Familiarisé à l’art, il obtient vite sa notoriété en raison de son talent précoce et part à la conquête de la péninsule dès ses 20 ans. L’auteur de fresques célèbres pour le Vatican est un véritable mythe de l’histoire de l’art, il résume à lui seul l’esprit de la Renaissance, combinant la grandeur d’un Michel-Ange avec le modelé suave d’un de Vinci. Ses œuvres furent en grande partie transférées à Florence sur décision de la papauté, mais il demeure à Urbino les lieux émouvants de sa naissance – que l’on peut visiter – et de son inspiration.

Grâce aux échanges culturels dans la péninsule italienne et en Europe, le duc de Montefeltro attira dans sa cour les plus grands artistes de l’époque. L’un d’entre eux, Piero della Francesca, peignit un célèbre diptyque recto verso commandé par le duc vers 1465, titré Le Triomphe de la Chasteté, représentant Federico da Montefeltro et sa femme Battista Sforza. Les deux pan-neaux reprennent une tradition héraldique transformée par l’artiste. Les portraits sont figurés de profil selon la tradition italienne, mais devant un vaste paysage, nouveauté introduite par les peintres flamands. Le portrait aurait été peint peu après un tournoi où le duc perdit son œil droit. La légende narre qu’il affirma : « Tant pis ! Je verrai mieux d’un seul œil que de cent« , et il décida de se faire couper la partie supérieure du nez, pour mieux voir des deux côtés. C’est le premier cas de rhinoplastie connu !

Le duc de Montefeltro constitua aussi la plus impressionnante collection de manuscrits de la Renaissance, marqués par sa préférence pour les ouvrages scientifiques. Ce n’est pas un hasard si c’est à Urbino que Piero della Francesca, passionné par les mathématiques et la perspective, rédige à la fin de sa vie deux grands traités dans lesquels il pose les fondements théoriques de la peinture. Le duc qui s’intéressait aussi à la culture juive collectionnait les manuscrits hébreux. La situation de la communauté juive se dégrada hélas radicalement après sa mort et un ghetto fut instauré en 1570. La collection d’Urbino est aujourd’hui conservée à la Bibliothèque du Vatican.

Après un 16e siècle où la ville vécut son époque artistique la plus riche et la plus intense tant sur le plan culturel que politique, ce haut lieu de la Renaissance va connaître un déclin, mais Urbino n’a laissé aucune place à la dégradation.

Attraits culturels

Il y a d’abord les extérieurs : le centre historique est un réseau dense de rues et de ruelles, d’escaliers et de sous-passage, de palais et d’églises, et d’un quartier juif du XVIe siècle où se trouvent deux synagogues, favorisé par la situation de tolérance et de prospérité instaurée par le duc d’Urbino au 15e siècle.

Attrait majeur de la cité, le palais Ducal, qui abrite aujourd’hui la Galerie nationale des Marches, est un des plus célèbres exemples d’architecture de la Renaissance. On y découvre des joyaux décoratifs comme les fameux studiolo, petites pièces entourées de marqueteries remarquables. De nombreux chefs-d’œuvre picturaux y figurent : La Cité idéale et La Flagellation du Christ de Piero della Francesca, La vision de Santa Francesca Romana d’Orazio Gentileschi, La Légende de la profanation de l’hostie de Paolo Uccello et bien sûr, La Muette du peintre Raphaël.

À découvrir aussi : le Duomo, construit entre le XVIIIe et le XIXe siècle, l’ex-monastère Sainte Claire, l’oratoire Saint Jean qui abrite des fresques spectaculaires de la Renaissance, l’Oratorio della grotta qui représente la vie du Christ à travers une succession de chapelles sous-terraines, l’église Saint François et l’église Saint Dominique. Au sommet de la ville, la forteresse d’Albornoz offre un panorama extraordinaire sur les paysages alentour.

Ville jeune, pôle d’excellence universitaire

C’est sans doute ce qui frappe le plus à l’arrivée : des jeunes, partout. Un contraste étonnant dans cette cité médiévale chargée d’histoire. Sur les 31 000 habitants, 16 000 étudiants résident dans le cœur historique et en font un lieu de vie extraordinairement dynamique et recherché. Chaque fin de semaine, la vie nocturne enflamme la vieille ville. Dans une ambiance bon enfant, nous avons assisté aux déambulations festives d’étudiants célébrant l’obtention de leurs diplômes. Car Urbino possède une des plus anciennes facultés d’Europe (XVIe siècle) ! L’Université Carlo Bo est une des plus réputées d’Italie et accueille entre ses murs séculaires technologie de pointe et installations optimales. La botanique a été centrale très tôt et la visite du jardin de l’université, l’Orto botanico, s’impose.

Terre écologique et gastronomique

Agriculture biologique, gastronomie de terroir, promenades à vélo. À Urbino et alentour, le paysage a été protégé. La production agricole s’est convertie à l’agriculture biologique, le mode de vie, le bien-être et la protection de la santé sont considérés comme une valeur essentielle. Paysage et végétation offrent un terrain d’activités de plein air rêvé : vélo, moto, excursions… La gastronomie, l’histoire, l’art et les traditions sont bien ancrés dans l’ADN la ville. On peut y trouver de quoi se restaurer à moindre prix (comme une petite piadina maison !) et trouver de belles enseignes gastro : le Portanova, l’Osteria l’Angolo Divino, l’Antica Osteria da La Stella et l’Albergo San Domenico réservent des trésors de subtilités et de créativité dans le goût comme la présentation de leurs mets salés et sucrés. Un paradis terrestre…

Rens: ccinice.org & visitezitalie.fr