Gênes « La Superbe » renaît !

Gênes « La Superbe » renaît !

Qui ne rêve pas de voyager et de déconnecter en trois heures de route ? C’est ce qu’offre Gênes, si proche et si méconnue pourtant. Cette ville est fascinante, loin de sa réputation de ville portuaire, industrielle et bruyante, entre tradition et modernité, Gênes poursuit sa mue sans perdre son âme. La capitale ligure connait aujourd’hui une incroyable renaissance. La voilà digne, à nouveau, de son surnom historique : la Superbe !

Il y a dans Gênes un je-ne-sais-quoi authentique et désuet que le tourisme de masse n’a pas encore abimé. On le ressent dès que l’on passe la frontière, mais à cette échelle, c’est saisissant. Une cité riche et enthousiasmante dans son architecture, l’animation de ses rues, de sa population, et dans l’abondance de ses offres gastronomiques autant que culturelles. Elle fut jadis l’une des grandes républiques maritimes italiennes et l’une des plus puissantes du bassin méditerranéen, frappée de plein fouet par la crise industrielle au XXe, et par des drames récents (effondrement du pont Morandi). Comment ne pas être séduit par ses perspectives étonnantes d’où émergent ici de puissants édifices médiévaux, là des splendeurs du Siècle des Génois, ici encore d’étonnants témoins de l’effervescence du XIXe siècle qui fit entrer la cité dans la modernité. Autant de trésors que la belle cité industrielle préserve et restaure jalousement, tout en s’ouvrant aux innovations grâce au plus célèbre des enfants du pays, l’architecte Renzo Piano.

Une ville de couleur et de culture

Calées sur le rivage, les collines en amphithéâtre semblent étreindre la ville avec tendresse. Entièrement tournée vers la mer avec son port, l’un des plus grands de la Méditerranée, où se mêlent toutes les nationalités, mais où les dialectes se réservent aux initiés, Gênes offre à l’azur infini un assemblage invraisemblable de demeures et immeubles, toutes époques confondues, qui s’étagent entre les collines, les anses et les falaises. Une palette de couleurs et une vie intra-muros qui furent source d’inspiration de nombreux artistes. Des auteurs de passage l’ont exaltée, de Mark Twain à Ernest Hemingway, d’Antonio Tabucchi à Joseph Conrad ou Paul Valéry. À l’heure du baroque, maîtres italiens et flamands ont participé à son embellissement tel le peintre Rubens qui décrivit les palais génois comme « un exemple de beauté et de magnificence pour toute l’Europe« . C’est Gênes aussi qui accueillit la première exposition d’Arte Povera mouvement contestataire d’avant-garde déterminant dans les années 60. Un esprit qui perdure comme en témoignent les graffitis qui s’affichent sur les murs. A l’instar de ceux rappelant de sinistre mémoire le sommet du G8 en 2001, théâtre de violences policières mortifères contre des manifestants altermondialistes.  

À la croisée des mondes

On entre dans la ville par le port. Ne vous laissez pas décontenancer par l’entrée dans la ville à cause de cette fichue autoroute à 4 voies qui surplombe directement le port. Une journée ne suffit pas à découvrir la richesse de la plus ancienne ville médiévale d’Europe au passé glorieux. L’histoire de Gênes relève de la mythologie. Toute entière construite de fortes influences étrangères, elle était au cœur des échanges entre le Moyen-Orient, l’Afrique du Nord et la Grèce. Le centre historique – 113 hectares – accolé au port antique révèle un patrimoine que la ville réhabilite depuis les années 2000 et dont elle ressent aujourd’hui les effets bienfaiteurs. Élue capitale européenne de la culture en 2004, inscrite au patrimoine mondial de l’UNESCO, la ville joue subtilement la carte patrimoine et modernité. L’entrée dans le cœur historique est saisissante, des arches datant du Moyen Âge abritent ici de nombreuses petites boutiques dont certaines labellisées historiques par le site officiel de la ville, car proposant des savoir-faire authentiques. Mais le meilleur moyen de connaitre l’authentique est de regarder vivre les Génois, voire leur demander les bonnes adresses !

Le renouveau du Porto Antico

Premier acte de sa renaissance, pour célébrer en 1992 les 500 ans de la découverte de l’Amérique par Christophe Colomb, le plus célèbre de ses citoyens, Gênes décide de lifter le Porto Antico, ce vieux port symbolique qui la borde depuis l’Antiquité, mais qui n’était plus alors qu’un alignement de hangars en ruine. Le port, construit par Renzo Piano qui a signé aussi le nouveau pont, est aujourd’hui une des fiertés de Gênes et un point d’attraction touristique où trône l’Aquarium géant, un des plus beaux du monde dit-on, et une drôle de tour avec vue panoramique. La Lanterna, nom donné au phare antique qui domine le port, offre une vue imprenable sur la ville. 

La via Garibaldi et les palais de Gênes

Pour respirer l’atmosphère typique de Gênes, il faut se perdre dans ses ruelles historiques, les caruggi, lever les yeux sur la splendeur de ses façades et regarder vivre ses habitants. La mythique Via Garibaldi (jadis La Strada Nuova) inscrite au Patrimoine mondial de l’UNESCO, témoigne d’une architecture incroyable et d’une quatorzaine de petits palais somptueux. C’est ici que se juxtaposent bon nombre des fameux palais des Rolli datant de l’époque baroque. Ici se trouvent trois musées, dans trois palais fastueux : Palazzo Rosso, Palazzo Bianco et le Palazzo Doria Tursi. Tous renferment du mobilier exceptionnel et de grandes collections d’œuvres d’art. Le dernier, Palazzo Doria Tursi, accueille le plus magistral des musées : la Strada Nuova.


Genova, Palazzo della Regione Liguria © DR

Le système des Palais des Rolli

Durant l’époque extraordinaire entre la Renaissance et le Baroque où Gênes est au sommet de sa grandeur, la noblesse génoise fit construire toute une série de palais richissimes dans la Strada Nuova et rénover les dizaines de résidences familiales qui existaient déjà dans le centre historique de la ville. Un système particulier d’hospitalité publique est défini en 1576 par décret, premier exemple en Europe d’un projet de développement urbain loti par une autorité publique : une liste officielle des palais prestigieux fut créée et leurs propriétaires obligés, tour à tour, d’accueillir les invités d’État. Sur les 112 répertoriés, 42 palais ont été classés en 2006 au Patrimoine Mondial de l’UNESCO ainsi que les Strade Nuove, ces voies urbaines résidentielles uniques qui gardent les Palais des Rolli. Certains appartiennent encore à de grandes familles, ou sont devenus des musées, d’autres abritent désormais des banques ou des institutions, telle la Chambre de commerce. 

Depuis 15 ans, deux fois par an (mai et octobre), le temps d’un week-end près de vingt Palazzi dei Rolli ouvrent leurs portes pour révéler leurs trésors au public : ce sont les Rolli Days. Expositions d’art contemporain, concerts, spectacles de danse et dégustation sont organisés. Une expérience unique, car on peut non seulement les visiter, y boire un verre, mais aussi y dormir. L’offre étant ultra limitée, il faut impérativement réserver à l’avance sur le site web visitgenova.it, ou par téléphone ou par mail au bureau du tourisme. Comptez, en fourchette basse, 265€ par personne pour deux nuits dans une autre dimension.

Les boutiques historiques

Elles sont partout dans le centre historique et répertoriées sur le site botteghestorichegenova.it. La Chambre de Commerce Italienne a eu l’intelligence non seulement de les mettre en valeur, mais aussi de garantir leur authenticité. Sur le fronton des boutiques, une plaque dorée certifie les plus anciennes (au moins 70 ans d’âge) qui ont maintenu la production et la vente des produits ainsi que le lieu d’origine. Souvent ce sont les mêmes familles, de plusieurs générations à l’image de l’Antica Frigittora Carega, spécialiste de la farinata sous les arcades près du vieux port ou la confiserie Romanengo, issue de 7 générations ! Une plaque en argent signale les boutiques qui maintiennent la tradition des produits, mais n’ont plus les lieux d’origine. 

Le Castellino d’Albertis, Musée des cultures du monde

Il y a d’abord la vue extraordinaire sur la ville dans un parc luxuriant. Puis le Château, écrin néo-gothique qui semble sortir d’un conte de fées. Construit à la fin du XIXe siècle par le capitaine Enrico Alberto d’Albertis, grand voyageur et explorateur, il recèle des trésors archéologiques et ethnographiques fascinants, objets des Indiens d’Amérique, Mayas, Incas, sagaies zambienne ou chinoise, préparations de médecines traditionnelles des grandes civilisations, hindoue, tibétaine, arabo-islamique. Un immense cabinet de curiosités. Mort en 1932, il donna château et collections à la ville de Gênes.

Gênes ville verte

À l’heure du changement climatique, Gênes est une ville en avance sur son temps. Les parcs et jardins publics occupent une superficie de 82 000 m2. Le climat doux de Gênes et sa position entre la mer et les Apennins favorisent une flore riche et variée. Les palazzi abritent de beaux jardins à taille modeste, mais il faut visiter surtout les villas historiques entourées de parcs splendides que l’on trouve à la fois dans le centre-ville et dans les quartiers périphériques, depuis les Parcs de Nervi à la Villa Pallavicino (Pegli) ou la Villa Duchessa di Galliera (Voltri). Pour les passionnés de plantes rares et exotiques, ne pas manquer le Jardin botanique de l’Université, ouvert au public.

Capitale mondiale de la voile en 2023

Le choix de Gênes, principale ville maritime italienne, pour accueillir le grand final de The Ocean Race en 2023 est à marquer dans les annales, car c’est la toute première fois que la course en équipage autour du monde, connue comme le test ultime d’une équipe de sport professionnel, accostait en Italie. Et également la première fois que l’arrivée de la course était jugée en mer Méditerranée, ouvrant l’évènement à une nouvelle audience dans cette ville européenne passionnée de voile. 


Genova, Porticciolo di Nervi © DR

Nervi, un monde à part

Gênes aligne plus de 30 km de côtes sur son territoire. À quelques minutes du centre-ville, on passe dans un autre monde, un petit village de pêcheurs du nom de Nervi. Un lieu très apprécié des Génois au printemps ou à l’automne avec ses maisons colorées et ses restaurants typiques. L’Italie comme on se l’imagine ! On y accède en plus par un joli sentier en bord de mer, la promenade Anita Garibaldi. Ce quartier résidentiel de Gênes était une commune avant d’être rattachée à la ville en 1926. Le vaste parc Parchi di Nervi possède des jardins botaniques et des villas centenaires abritant des musées comme la Galleria d’Arte Moderna.

Ville d’art

La région génoise et sa Riviera aux tons pastel sont à l’heure de l’art contemporain. Une trentaine de lieux d’exposition proposent un parcours culturel varié autour de la capitale, à l’instar de la grande exposition Man Ray au Palais Ducal, à l’été 2023. Les grandes pinacothèques sont établies dans de somptueux palais. Les villages perchés abritent des galeries d’art qui relaient la création actuelle. Tous les ans, au mois de février, les galeries de toute l’Italie se réunissent à l’occasion d’ArteGenova, le rendez-vous des passionnés, entre grandeur d’autrefois et modernité !

Rens: ccinice.org – visitgenova.it – botteghestorichegenova.it – visitezitalie.fr

photo Une : Genova Panorama Centro Storico © Carolina Fanni