01 Oct « Le Cinéma est un puissant outil de Démocratie »
On doit cette réflexion à Robert Guédiguian, célébré en 2022 par le Festival départemental de cinéma d’auteurs, dont la 4e édition sera dédiée à la Méditerranée dans toute sa diversité, du 8 au 13 octobre prochain dans plusieurs ville du Var.
Avec ces quelques mots, le cinéaste marseillais – qui a succédé à Christian Philibert, honoré lors de la 1e édition du Festival départemental de cinéma d’auteurs, et avait précédé Bertrand Tavernier à l’affiche l’an passé – a parfaitement défini l’objet central de l’association Ciné-débats citoyens, créée en 2012 à Lorgues par une bande d’amis cinéphiles. L’idée de départ était de lancer un ciné-club s’intéressant à des sujets de société : environnement, économie, politique, intégrisme, violences conjugales… À titre d’exemple, le rendez-vous de septembre s’est focalisé sur la thématique de l’amour et du sexe chez les personnes âgées, autour du film 7e Ciel d’Andreas Dresen, tandis que celui de novembre s’intéressera aux maladies dégénératives et comment y faire face, en prenant appui sur l’œuvre de Zabou Breitman, Se souvenir des belles choses. Le principe reste le même à chaque fois : une projection suivie d’un débat avec le réalisateur et/ou un expert. Plus récemment, Robert Florès, éducateur de formation, et son équipe ont également lancé l’action Cinéma et parentalité, en partenariat avec la CAF. L’objectif étant d’apporter un soutien et une aide aux familles, en accompagnant les parents dans leur parcours de vie et en favorisant la prise de parole et l’écoute.
C’est en 2015 que l’association varoise lance, en collaboration avec le Lycée Thomas Edison, les Rencontres cinématographiques de Lorgues, imaginées autour du concept : ”de la cité (scolaire) à la cité (la communauté)”. La volonté était de favoriser l’éducation à l’image cinématographique contemporaine et de forger le regard critique des aspirants citoyens. Identité, Voyage, Illusion… Trois thématiques pour autant d’éditions à l’issue desquelles, en raison de divergences, l’association quitte le projet – qui se poursuit sous le nom de Festival Cin’Édison – pour créer le Festival départemental de cinéma d’auteurs en 2019.
« Partir du local, pour parler à l’international »
Après avoir mis à l’honneur un auteur lors de ses premières éditions, la manifestation a choisi cette année de rendre hommage à la création méditerranéenne. Avec toujours cette idée : « partir du local, pour parler à l’international« , indique Robert Florès.
Si le cinéma reste le cœur de l’événement, le public pourra cette année découvrir, lors de la journée d’ouverture à l’Espace François Mitterand de Lorgues, une exposition photographique de SOS Méditerrannée. Visible les 8 et 9 octobre, Être(s)Humain(s) témoignera de la solidarité citoyenne et de la mobilisation internationale – toujours insuffisantes malheureusement – au travers de clichés pris essentiellement lors d’opérations de sauvetage, reflets de l’urgence humanitaire en Méditerranée, route migratoire la plus mortelle au monde depuis 2014… Un propos complété par les projections du film italien Moi capitaine de Matteo Garonne, sur deux jeunes Sénégalais décidés à rejoindre l’Europe, et de l’autofiction-documentaire Méditerrannées d’Olivier Py, puis conclu en soirée par la pièce de théâtre Mal de mer, proposée par la Cie du Cèdre. Et cette question qui émerge : quelle humanité reste-t-il sur notre continent en matière de politique migratoire ?
Un panorama de la création méditerranéenne
Chaque journée fera ensuite un focus sur une région méditerranéenne : le bassin européen, le 9 octobre à Cotignac, avec des œuvres espagnoles et françaises, parmi lesquelles Le Royaume, du cinéaste corse Julien Colonna, qui figurait dans la sélection Un certain regard à Cannes en mai dernier. Projetée en avant-première, cette fiction s’inspire du vécu du réalisateur pour dépeindre une touchante relation père-fille au milieu d’une guerre mafieuse, baignée de cavale, d’héritage, de vengeance et de mort.
Le lendemain, du côté de Lorgues, un détour par le Proche-Orient tentera de dénouer quelques fils pour mieux comprendre le conflit israélo-palestinien. Citons notamment le multi-récompensé Tel Aviv on fire, comédie israélienne réalisée par… un cinéaste palestinien, Sahem Zoabi. « Pas mieux que la comédie pour traiter de sujets sérieux !« , s’exclame Robert Florès. Ou encore Le piège de Huda, thriller d’espionnage inspiré de faits réels, autour duquel interviendra en visio, son réalisateur Hany Abu-Assad.
Le programme du 11 octobre se dirigera vers le Maghreb, en s’intéressant aux thématiques de l’homosexualité (Le bleu du Caftan) ou du déracinement (L’enfant du Paradis), tandis que celui du 12 octobre poussera jusqu’aux rives de la mer Égée et de l’Égypte, avec notamment le film Yurt de Nehir Tuna, ou le portrait d’un adolescent révolté sur fond de tensions entre laïcs et islamistes dans la Turquie des années 90. Un pays qui a connu une violence politique extrême au cours du XXe siècle…
La journée de clôture constituera quant à elle une digression en forme d’introspection, de prise de recul vis-à-vis des nombreux thèmes abordés durant le festival, puisqu’elle se déroulera au cœur du Musée des Beaux-Arts de Draguignan, autour des films Maria Rêve de Lauriane Escaffre et Yvo Muller, et Caravage de Michele Placido. Deux projections suivies d’une visite privée du musée et de la remise des prix : les Oliviers d’or, d’argent et de Bronze.
Ce Festival département de cinéma d’auteurs, à la programmation dense, sillonnera donc 12 pays du bassin méditerranéen, au travers de 17 œuvres, du drame à la comédie, du thriller au film social. Des films aux messages forts, parmi lesquels la tentation autobiographique ou l’adaptation d’histoires vraies est souvent présente, et qui soulèvent une question fondamentale, dans un monde toujours plus complexe : peut-on s’extraire de nos destinées ?
8 au 13, Lorgues, Cotignac, Draguignan, Salernes. Rens: cinedebatscitoyens.fr
photo Une : Moi capitane de Matteo Garonne © Greta De Lazzaris