03 Déc Un conte de fées sans sucre ajouté
Quelques jours avant de célébrer le passage à la nouvelle année en compagnie de La Mégère apprivoisée du côté de Monaco, les Ballets de Monte-Carlo égrèneront les derniers jours de l’Avent avec Cendrillon, programmé par l’Opéra de Toulon au Zénith.
Ballet en trois actes de Sergueï Prokofiev, d’après le livret de Nikolaï Volkov, Cendrillon fut créé au Théâtre Bolchoï à Moscou en 1945. Presque 80 ans après sa création, et 25 ans après sa recréation par les Ballets de Monte-Carlo, sur une chorégraphie de Jean-Christophe Maillot et une scénographie d’Ernest Pignon-Ernest, il sera donné à Toulon les 21 et 22 décembre 2024. « Fidèle à sa réputation de restaurateur de contes de fées, Jean-Christophe Maillot décape Cendrillon de sa couche de sucre et redonne au texte de Perrault sa force originelle dans une approche plus profonde« , indique l’Opéra de Toulon, et pose une question : « Comment le souvenir des êtres disparus façonne l’avenir de ceux qui restent ? » Le thème du prince épousant la roturière s’efface ici, laissant place à une réflexion autour du deuil. Au lever de rideau, Cendrillon apparaît, tenant dans ses mains la robe blanche de sa défunte mère. Elle y enfouit son visage pour trouver du réconfort. Hélas, sa marâtre et ses deux filles ne cessent de la tourmenter. Ici, pas de femme revêche ni de filles aussi laides que stupides. Toutes sont puissamment érotiques et attirantes. La belle-mère, dévoreuse superbe, use de sa sensualité pour réduire à néant l’autorité de son mari. Et ses filles, tout aussi redoutables, évoluent avec aisance à la Cour du roi dans une danse impudique et lascive. Quant à la Cendrillon d’autrefois, elle n’est plus… Redoutable, elle doit se battre pour se sortir du bourbier dans lequel le remariage de son père l’a fourrée !
Au-delà de la thématique du deuil, ce Cendrillon est aussi « une peinture féroce d’une société qui dégouline d’artifices« . Cendrillon tranche par sa simplicité et n’a nul besoin d’accessoires pour être belle… Même la fameuse pantoufle de vair, ici un pied nu recouvert d’une fine poudre d’or, devient l’objet symbolique de tout le ballet, exprimant à la fois le dépouillement de la jeune fille et cette partie du corps sans laquelle la danse ne peut exister. Car, finalement, le pied n’est-il pas le pivot de l’art chorégraphique, son appui et son tremplin d’envol ?
21 & 22 déc, Zénith, Toulon. Rens: operadetoulon.fr
photo : Cendrillon © Alice Blangero