Les formes du trouble

Les formes du trouble

Nous l’annoncions dans notre précédent numéro, la galerie Contenus débordants à Toulon vient d’inaugurer sa nouvelle exposition, Trouble Markers, visible jusqu’au 24 octobre. Une proposition imaginée par Sandra Mauro, née du dialogue avec de jeunes artistes, tous diplômés de l’ESADTPM : Ellvina Bimanato, Thomas Buffenoir, Bonnie Caparros, Gabriel Garçonnat, Enzo Massa, Jason Omer, Tifenn Pâris, Steven Roger et Gabriel Santarelli.

La galerie toulonnaise est investie du sol au plafond par leurs productions, issues de démarches et d’esthétiques multiples : de la peinture à l’objet, de l’impression numérique à la vidéo. Prélevées dans le corpus de chacun, ces pièces composent une conversation sensible et inattendue, où formes et matérialités se frottent et se répondent. Reliées par une même intensité, elles ouvrent des espaces de doute et d’instabilité, cultivent les marges de la perception et donnent à voir l’image comme question plutôt que comme réponse.

Avec son sol miroitant, cette mise en espace ne cherche pas à expliquer : elle propose d’éprouver, de suspendre le regard, d’ouvrir un champ où l’invisible et l’indécis deviennent matière à imaginer.

Certains y font le choix du jeu, non comme divertissement, mais comme puissance de réinvention. Une manière d’empoigner le réel, dans sa dureté comme dans sa vacuité, où la désobéissance joyeuse n’est jamais très loin. D’autres investissent l’espace du care, ce soin porté à l’être, aux lieux, aux minorités, aux présences qui échappent aux normes. Plusieurs expriment un désir d’être soi, une liberté tenace, dans la différence, à la marge ou par l’humour. Quelques-uns interrogent avec poésie la mémoire lacunaire, le territoire mouvant, l’identité fluide, le visible toujours partiel. Ces pièces explorent l’entre-deux, ouvrent des seuils, exigent une qualité d’attention. Elles dialoguent non par la forme mais par une manière commune d’habiter le réel, ni simple ni transparent, et dessinent un monde aux contours mouvants et perturbants, à éprouver et à tenter de comprendre. Une traversée liminale, au cœur du trouble.

Tous ces artistes partagent un ancrage commun : ils s’inscrivent pleinement dans la scène toulonnaise. Thomas Buffenoir et Tifenn Pâris, par exemple, travaillent à l’atelier Calabrun aux côtés d’Henri Salamero, son initiateur, et de Célia Perez, Arthur Guy et Ambre Macchia. Plus qu’un lieu de travail, Calabrun se veut un espace vivant d’expositions et d’événements, dédié à la création contemporaine et à la jeune scène artistique.

De leur côté, Gabriel Garçonnat et Gabriel Santarelli portent le collectif TaTonTitre, accompagné par Virginie Sanna et Yann Perol. Ce projet expographique itinérant se déploie à chaque édition dans un nouvel espace, réaménagé pour l’occasion, et associe une expérience culinaire pensée en résonance avec le contexte et les thématiques explorées.

Enfin, Sandra Mauro poursuit avec Christine Heitzler l’aventure de Particules complémentaires, structure membre du réseau RAVE (Réseau des Arts Visuels Essentiels) dans le Var, depuis 2017.

Jusqu’au 24 oct, Galerie Contenus Débrodants, Toulon. Rens: contenusdebordants@gmail.com

photo: Vue de l’exposition Trouble Markers © DR