17 Juin Comme une impression de liberté
Trop heureux de vous retrouver, de pouvoir imprimer des idées, de partager avec vous, après cette période qui n’a pas été pénible seulement au niveau de la santé publique. Elle nous a fait voir notre pays plonger dans la violence, l’arrogance, les idées courtes, le sexisme, le racisme avec, comme cerise sur le gâteau, un Président et un gouvernement qui ont « classé » la Culture comme non essentielle. Pourtant, c’est le lien entre les individus qui fait nation. Il est assuré par un partage d’idée, une Culture que l’on nomme République. Paradoxe funeste pour celui qui l’ignore et la préside, terreur funeste pour celle qui la nie et fait planer l’ombre de l’obscurantisme au-dessus de nos têtes.
Alors, je ne reviendrais pas non plus sur le fait que le secteur économique des métiers de la Culture n’existe toujours pas alors que certains d’entre eux sont millénaires à l’instar du Théâtre. Aujourd’hui, ce sont les outils qui déterminent paradoxalement les secteurs économiques comme le numérique. Comme si ce dernier avait remplacé la Culture. Comme si les liens virtuels sur les réseaux «pseudo » sociaux avaient surpassé les liens réels. Le numérique doit rester ce qu’il est, un outil fort utile, mais qui ne pourra jamais nous remplacer, ni pour décider, ni pour désirer, ni pour vivre, tout simplement.
Avec de telles analyses, que l’on ne s’étonne pas que la communauté nationale éclate en mille groupes. Car à l’instar de ces réseaux, chacun se lie avec ceux qui pensent la même chose, oubliant ainsi que la diversité et le débat sont la base de la démocratie. Gare à ceux qui ne sont pas d’accord : ils seront harcelés, menacés… C’est la loi du plus fort, de celui qui crie le plus, qui tape le mieux, et maintenant, qui tue. D’ailleurs les assassins de masse ne sont-ils pas relayés par YouTube, Facebook et les autres ? Mais attention, Madame, cachez ce sein que l’on ne saurait voir !
Alors, oublions donc ces informations diffusées par des clowns dangereux comme ceux qui animent certaines chaînes d’information continue, les « robinets à terreur » et qui font leur beurre sur la violence, le racisme, la vulgarité ou la bêtise… Oublions un été les conséquences de l’avidité des 1%, prêts à détruire la Planète pour encore plus se « gaver ». Comme le Baron Harkonnen dans Dune, ils se nourrissent du sang des autres. Ils en portent des stigmates répugnants la plupart du temps d’ailleurs. Le mal semble irréparable : les populistes font de l’audimat, on se harcèle volontiers, les enfants s’entretuent et les speakers de Big Brother nous encouragent tous à aller encore plus loin dans l’idiotie, la vocifération et la brutalité. Bientôt les nouveaux Doriot de la TV et du Net nous dicteront nos comportements. Appelant à la tuerie, ils disent « plaisanter » … Ils militent pourtant pour des idées qui ont coûté des millions de morts. Le peuple serait-il devenu amnésique, ignore-t-il l’Histoire ? Va-t-il refaire la même ? Lever le bras bien haut et raser les têtes aux « catins » comme un sacrifice pour expier ses crimes et sa propre lâcheté, au moment de ce qu’il appellera la pseudo-libération. Navrant, triste et effrayant.
Alors bas les masques, vive le soleil, la plage et la liberté. La seule chose qui puisse arrêter cette poussée irrationnelle et destructive, cette nouvelle adoration du « veau d’or connecté », n’est pas la violence, car les outils de cette dernière nous seraient vendus par ceux qui la prônent et les enrichiraient encore. Non. Ce qui pourrait bloquer la machine, c’est que nous n’allions plus produire, que nous ne consommions presque plus, et cela pendant 10 à 15 jours. Plus de flux tendu, plus de profit… Stéphane Benhamou a développé ce scénario dans un livre, un conte dystopique. Dans La rentrée n’aura pas lieu, 12 millions d’aoûtiens partent en vacances et ne veulent plus rentrer. Pas de leader, pas de violence, rien à filmer, plus de circulation d’argent ou de véhicules. Juste la liberté. Alors là : les prêcheurs de violence ne serviraient plus à rien, les nouveaux riches du « buzz » se retrouveraient « à la rue », la bourse s’effondrant, les businessmen se jetteraient des tours de verre ! Et nous… tranquilles, libres, vivants, admiratifs de ce que serait le monde sans tous ces cons violents, cupides et inhumains.
C’est alors que Véronique dit : « Bien que vibrent le soleil, l’été et les terrasses bondées, un étrange courant d’air parcourt aujourd’hui la ville, échappé d’une porte laissée ouverte, battant dans le vent. En place du formidable courant d’art annoncé, de la poussière retombant doucement sur la ville. Comme si déjà la torpeur de l’automne annonçait un long hiver. Comme si déjà la torpeur de cet été avait des couleurs d’automne annonçant un long hiver ». Message personnel, comme le chantait Françoise Hardy… Comprenne qui voudra ce destin d’une ville, celui d’un monde sans culture…
Allez, je vais faire la planche, écouter les oiseaux et regarder le ciel : pas besoin d’écran, de courant, de réseau, juste de temps et de liberté. Profitons en tant que nous pouvons encore bénéficier en « nombre restreint », selon « les procédures adéquates », masqués et poinçonnés par le « vaccineur des lilas », de tous les festivals qui auront les moyens d’obéir.