De l’autre côté du miroir

De l’autre côté du miroir

Bernard Taride nous a quittés le 11 juillet 2022. Cet artiste proche de l’École de Nice était surtout un « être humain » au sens de Litte Big Man, un cœur énorme, un poète, un plasticien, avec un humour d’une finesse rare.

Ce « pince-sans-rire » est né au Maroc, mais en 1956, c’est à Nice, où il s’installe pour ne plus jamais en partir, qu’il va exceller dans son art. Des miroirs, du bois, des compositions… Il est facétieux, inventif, ne s’encombre d’aucune convenance. Sa liberté de ton le pousse à toutes les expériences, il mêle les matières, se joue des jeux de lumières. N’oublions pas qu’il fut quincaillier, et que même dans son métier il « détourna » tout matériel, rendant ainsi une poésie au quotidien, partageant et fréquentant les artistes de l’École de Nice. Son fils Gérard a grandi en passant des journées dans les ateliers d’Arman, Sosno, Ben, Fahri… Bernard ne s’est jamais pris au sérieux et ne s’est jamais privé d’un bon mot, même dans le titre de ses œuvres : Hommage collatéral, La corde pour s’éprendre, Les lésions dangereuses… Sa passion pour les clous et les miroirs le mène à des œuvres surréalistes qui jouent avec la réflexion, dans tous les sens du terme : réflexion/reflet, réflexion linguistique et jeux de mots souriants…

Une autre de ses passions fut le jazz dont il était une véritable encyclopédie. Il écrivait notamment pour le Patriote Côte d’Azur. Il a rencontré et invité dans sa maison bon nombre de musiciens, et était très lié à Dizzy Gillespie… C’est peut-être ce calme, cette élégance et ce goût pour le jazz et les arts qui ont mené son fils à devenir musicien (au sein du groupe Plein Sud), ainsi que son petit-fils qui vient de sortir le titre Cucaracha chez Universal Music, sous le patronyme d’Adamé. Gérard a baigné dans la créativité et expose en ce moment pour l’événement Exodes à Saint-Raphaël une œuvre poignante que nous avons évoquée lors du numéro précédent. Bernard savait partager et faire partager avec un chic et une douceur irremplaçables. Son sourire et son humanité nous manqueront, autant que son humour. Nous adressons à toute sa famille nos plus sincères condoléances, même si cette formule un peu trop pompeuse n’aurait guère plu à Bernard…

photo : Bernard Taride dans son atelier © DR