L’an 1 de la Dévolution

L’an 1 de la Dévolution

Avec l’investiture d’un fou maquillé, bouffon au teint orangé par la terracotta et le contour des yeux blanchis par l’anticerne, suivi par son « associé », l’homme le plus riche du monde, et leur cour de financiers : c’est l’An 1 de la Dévolution (1) qui commence.

N’est-on pas face à un schéma qui rappelle ce que ThyssenKrupp a fait en Allemagne lors de ses heures les plus sombres, comme l’avait écrit Éric Vuillard dans son essai couronné du Goncourt 2017, L’Ordre du jour (2). On entend des débats où l’on se demande s’il ira au bout… Mais le fait est que cela s’est déjà passé en Europe, et que l’allié le plus puissant de l’OTAN est devenu l’un des financiers de toutes les extrêmes droites européennes…

Bizarrement les barons de la « Tech », de la Silicone Valley, suivent Musk et Trump, le couple diabolique. Eux que l’on nous présentait comme des gens « cool »… Voilà que la « Tech » devient un danger. Comme le disait Chloé Ridel, lors d’un débat sur France 5 dans l’excellente émission : C ce soir, le 8 février dernier : « Le problème de nos jours est que la technologie n’est plus gérée par les démocraties, mais par l’argent et une poignée de milliardaires. » Alors, ne soyons pas étonnés que l’on constate un appauvrissement du QI moyen mondial. Des études indiquent que les enfants « asservis » par les écrans pourraient voir leur système neurologique transformé. Plus de calcul mental, plus de recherches dans les livres d’histoire puisque l’on peut faire tout cela grâce à son smartphone ou son ordinateur. S’en suit logiquement un affaiblissement de la capacité à mémoriser qui entraine de facto des problèmes cognitifs. L’Europe aura mis 30 ans à s’en apercevoir, ou peut-être que ses dirigeants auront été charmés pendant tout ce temps par les lobbyistes de ces grandes firmes qui ont colonisé digitalement l’Europe et une grande partie du Monde. Aujourd’hui on ne parle que des logiciels chinois ou russes, mais cela fait plus de 30 ans que les Américains ont commencé la même entreprise de pillage de nos données. Les outils informatiques de cette « colonisation digitale » ont aussi pour conséquence de créer une addiction aux machines et une perte d’autonomie intellectuelle notable… En outre, dans notre propre pays, il n’y a plus de loi anti-trust, anti-concentration. Et c’est comme cela que le principal sponsor de l’extrême droite s’est permis de posséder 51 % de l’édition d’ouvrages en France et que 8 oligarques milliardaires possèdent 80% des médias. C’est la loi de l’argent qui remplace maintenant la déontologie. La vérité officielle est celle de la finance, en dehors de toute contingence factuelle. 

Le réseau social « modèle » de cette révolution fasciste et numérique est bel et bien X (ex-Twitter) où les algorithmes sont réglés pour laisser place à ceux qui crient le plus fort et aux mensonges les plus insensés. Pire, voilà que Grock, la nouvelle fonction de ce réseau donne du ChatGPT (3) et du Midjourney (4) gratuitement : c’est à dire de quoi fabriquer de fausses images et de faux textes. Et les autres grandes firmes qui possèdent les réseaux sociaux ont décidé de suivre « l’exemple ». Ce phénomène n’est-il pas une explication au fait que les peuples ont tendance à notre époque à confier leur destin à des hommes hyper riches, hyper autoritaires et hyper limités intellectuellement ? Il est clair que l’abrutissement des masses et la confusion organisée par ces réseaux sociaux et une presse partiale, à laquelle les oligarques dictent leur parole, en sont le catalyseur. Comme le disait Hannah Arendt dans Les fondements du totalitarisme : la confusion est le début de l’installation du totalitarisme. Elle entraine la terreur. Et souvent la masse se replie sur elle-même et attend un sauveur, un homme « fort » qui la rassure. L’Histoire se répète. N’y aura-t-il que les missiles et les bombes pour nous tirer de cette transe hypnotique imposée par le « Matrix » (5) des écrans alimentés par les oligarques ? Qu’on arrête de les prendre pour des génies, ils ne sont que des financiers qui ont scandaleusement profité des avantages fiscaux de la mondialisation. Comme Trump n’est qu’un héritier, nul en affaires, et qui n’a réussi qu’en animant une émission TV minable. Chacun veut gagner et écraser son voisin, comme l’idole américaine maquillée comme un peintre avec ce regard satisfait et prédateur du pervers narcissique. Et voilà que ce Tartuffe moraliste et sa cour de financiers de la « Tech » veulent établir un nouvel ordre moral où l’on peut impunément être raciste, sexiste, contre l’avortement…

N’est-il pas temps que l’Europe crée ses propres réseaux sociaux, sa propre défense et surtout modifie ses alliances ? Nos dirigeants sont-ils à ce point chloroformés ou peut-être corrompus pour ne pas réagir ? Il fut un temps où, en France, il y avait de l’eau dans le carburant des tanks qui avaient des tourelles en bois alors que l’ennemi construisait des chars blindés se déplaçant à vive allure, et des Stuka, avions ultra rapides, dans l’apathie générale des élites françaises… Déjà à l’époque, de soi-disant patriotes « tendaient la main » à cet ennemi qui maîtrisait la technologie (leurs « descendants » actuels continuent d’ailleurs de le faire avec le soutien de certains oligarques et de leurs médias). Il aura fallu qu’un officier, un certain De Gaulle, se révolte pour que tout cela cesse, mais à quel prix : une Guerre Mondiale ! Si cela continue, on voit où l’on peut en arriver. Mais cette fois ce sont certains de nos propres alliés qui pourraient se servir de la technologie contre nous, sans compter les tyrans de tous bords. Réveillons-nous, ne laissons pas ces fous nous dicter notre avenir.

(1) Terme cher au groupe DEVO, qui exprime son sentiment que notre monde au lieu d’évoluer, dévolue, régresse en quelque sorte.
(2) L’ordre du jour est une enquête, preuves à l’appui, démontrant que ThyssenKrupp et consorts ont choisi de financer l’ascension d’Hitler bien avant son arrivée au pouvoir. Démontrant ainsi ce que peut avoir comme impact sur l’Histoire la cupidité par la manipulation grâce à la puissance économique.
(3) Ce programme permet de créer des images à partir de descriptions textuelles
(4) GPT-4 agit comme un écrivain digital. Il peut rédiger des articles, répondre à des questions, résumer des textes, traduire des langues et bien plus encore. 
(5) Le pitch : Philip K. Dick auteur de SF décrit le Matrix et son programme informatique qui fait avaler n’importe quoi à des humains réduits en nourriture terrestre. Une vidéo, tournée lors d’une conférence donnée par l’auteur en 1977, à Metz, le montre en train d’expliquer un concept déjà développé dans son roman Le Maître du Haut Château, publié en 1962.