Entre les mains de Véronique Pépin

Entre les mains de Véronique Pépin

Là-haut, existe un lieu presque hors du temps : au pied de la massive architecture de son château s’étend une place où les enfants courent et jouent, où se disputent de joyeuses parties de pétanque, où l’on savoure un verre en profitant du soleil. Un art de vivre qui a souvent attiré les artistes dont la plus célèbre demeure à ce jour Suzy Solidor. Là-haut, c’est le Haut-de-Cagnes : un écrin sur lequel les artistes déposent leurs bijoux les plus insolites. Véronique Pépin fait partie des artistes résidents de l’Espace Solidor, le Musée du Bijou Contemporain de Cagnes-sur-Mer, et bénéficie ainsi d’un atelier de création. C’est dans La Crypte, un lieu partagé avec d’autres artistes, qu’elle confectionne des bijoux qui sont en fait de véritables œuvres d’art.

Le bijou contemporain tel qu’il est abordé par Véronique Pépin n’est pas qu’un ornement, « c’est une œuvre qui peut bouger et se transformer », indique-t-elle. L’or précieux ou l’argent font place au tissu, à la cire, à la nacre, à la corde… Son choix se porte sur des matériaux éphémères, sur le végétal aussi qui la renvoie à sa toute première formation de fleuriste-parurière. « L’amour du végétal ne m’a jamais quitté« , avoue-t-elle, et sa présence est très visible dans son travail. Un élément qui la lie inévitablement à l’odorat, ce sens fascinant, à la fois réel et invisible, capable de provoquer des images, de réveiller des souvenirs. L’odorat fait donc partie de son processus de création. « Quand on sent une odeur, on est dans le présent et pourtant on bascule dans la mémoire. Cela provoque un souvenir émotionnel qui va devenir une œuvre. » En plus d’être une source d’inspiration, le travail sur l’olfactif tient une place importante dans l’ensemble de son activité à travers des ateliers permettant de développer une écriture spontanée dans laquelle l’individu se redécouvre à travers ses propres mots. Des moments intenses tant pour les participants que pour Véronique Pépin qui les guide dans cette expérience : quand l’odeur fait remonter le souvenir de façon inattendue, c’est un monde de surprises qui s’ouvre sans savoir quel visage il aura.

 

Une création en perpétuel mouvement

Le travail de l’artiste est riche de multiples influences mouvantes. « Ce qui m’intéresse aussi, c’est le mouvement. » Le mouvement de la matière qui, comme la cire par exemple, se transforme : de solide, elle va devenir malléable tout en permettant de jouer avec la lumière. De manière générale, le mouvement est indissociable de la vie. « Le parcours de vie est toujours en mouvement ; il est impossible de le figer. De même, l’art évolue avec la société et avec soi-même. » Puis, il y a le geste qui est tout aussi important que la matière. « La matière est une prise au corps. Je travaille dans un rapport au corps. » Celui-ci trouve probablement l’une de ses plus belles expressions dans ses créations aux côtés de sa sœur, la danseuse et chorégraphe Emmanuelle Pépin. Il y a peu, les deux artistes ont bénéficié d’une résidence de recherche et de création de deux mois au Musée Camille Claudel de Nogent-sur-Seine. Une immersion qui leur a permis de s’imprégner sans limites de l’art et de l’esprit de la sculptrice pour créer à leur tour une œuvre en résonance avec leur propre univers. « Je me laisse porter par l’endroit, je me laisse absorber pour entrer en symbiose avec le lieu. Ce sont des moments précieux. » La collaboration entre les deux sœurs n’est pas rare, permettant ainsi à Véronique de créer des pièces uniques qui sont utilisées pour les performances chorégraphiques d’Emmanuelle avant de devenir une œuvre indépendante. Prochainement, elles devraient se rendre à Conques afin de travailler au cœur de l’Abbatiale sur une recherche en lien avec les vitraux de Pierre Soulages. En début d’année, Véronique était présente au Grand Palais, à Paris. Entre deux, vous pourrez toujours aller découvrir une partie de ses œuvres en vous rendant à La Crypte, 14 place du château, dans le Haut-de-Cagnes.

(photos : 1- Véronique Pépin en création © Louis-Paul Fallot / 2- performance L’écho des silences, Emmanuelle Pépin & Véronique Pépin © DR / 3- L’Oiseau au Grand Palais, Paris © DR)