Y’a des cigales dans la fourmilière de l’Entrepont

Y’a des cigales dans la fourmilière de l’Entrepont

Que l’on se rassure, les artistes continuent de créer et nous préparent des rêves à partager quand la bise sera passée… Malgré l’absence de public et de salles de spectacle ouvertes (et donc vraiment vivante), les lieux de résidences maintiennent plus que jamais l’accueil à la création… notamment à L’Entrepont, à Nice !

Même si les fourmis ne sont pas toujours les plus généreuses, les cigales ne s’avouent pas pour autant dépourvues. Elles chantent, dansent, jouent, créent et se préparent à retrouver leur meilleur partenaire de scène, le public ! L’Entre-Pont, lieu de résidence et de création pour l’art vivant à Nice continuent de voir passer en ses murs autant de belles idées que de projets, aussi pertinents les uns que les autres, qui ne demandent qu’à être découverts, vus, appréciés, critiqués… Parce que oui, finalement rappelez-vous, c’était ça le spectacle vivant : un moment d’art vécu en temps réel et aussitôt éprouvé par tout le monde en même temps, par les spectateurs comme par les artistes. Nous sommes tous là, dans un espace où l’on a été convoqué ensemble, sans se concerter, par nos désirs singuliers de rencontrer une œuvre. On partage des scènes, on vit des émois en tout genre, mais on les vit ensemble, dans l’échange…

Depuis ce fameux 30 octobre dernier qui a vu le spectacle « vivant » se mettre en sommeil, l’Entre-Pont en a vu passer des cigales, et, je voulais vous en parler un peu pour préserver ce lien indispensable que la Culture nous offre. Comme d’habitude, il y en a pour tous les goûts, toutes les disciplines, toutes les couleurs, toutes les humeurs…

Streaming et résidences

Il y a eu de la musique. L’Ensemble Baroque de Nice, dirigé par Gilbert Bezzina, est venu proposer un concert sur le thème Les Femmes, avec des oeuvres d’André Campra, et en compagnie du baryton Phillipe Cantor, en live-streaming. Alors qu’habituellement les musiciens jouent dans les églises du Vieux-Nice, ils se sont adaptés à la situation : c’était leur première dans les locaux du 109. C’est que la crise sanitaire nous rapprocherait presque…

On continue ce voyage rétrospectif avec un festival de danse, Les Inclassables, organisé par la Cie /TranS/, dirigée par Laurence Marthouret. C’était la 3e édition en décembre dernier et figurez-vous que lui aussi s’est adapté et a tout proposé en ligne ! Il y avait des performances, des spectacles, des ateliers, des vidéos-danse, et même une table ronde avec des chorégraphes pour permettre et conserver les échanges.

Le Hublot, spécialisé dans les arts numériques, s’est quant à lui lancé le chalenge de questionner le numérique et les liens sociaux en proposant une immersion dans les locaux de l’Entre-Pont entièrement numérisés en 3D. Je vous explique : vous assistez à des débats, des reportages et même à des performances VJ et DJ à l’Entre-Pont depuis votre canapé ou la piste de danse de votre salon ! Il y en a eu déjà deux, les troisièmes Controverses numériques se dérouleront le vendredi 26 mars en fin de journée

Comme je vous le disais, les artistes poursuivent leurs résidences de créations, et les sorties de résidences existent toujours, elles sont simplement réservées aux professionnels… Nous avons vu Bénédicte Allard dans la peau de Frida Kahlo, Ma réalité. Une pièce que lui a inspiré l’écriture d’un mémoire, et qu’elle a interprétée dans une mise en scène de Clément Althaus : « Autoportrait irrésistible peint à l’or, au sang et à la sueur d’une femme dans un monde d’hommes. ». La Cie BAL, tenue par Thierry Vincent, a proposé une adaptation du conte d’Hans Andersen, Allumette, où la petite fille s’adresse directement au narrateur pour savoir si l’on ne pourrait pas réécrire un peu l’histoire. La danseuse Morena Di Vico a présenté Ta Chair avec sa Cie Incontro. Un spectacle de danse qui nous raconte nos vécus si singuliers et pourtant si communs finalement, une véritable invitation à retrouver l’enfant qui est en nous. La Trucmuche Cie de Michaël Allibert est également partie à la redécouverte du spectacle vivant et des corps qui l’habitent… Dans une rupture avec la forme traditionnelle et frontale de ce qu’on peut appeler un « spectacle », ce projet nous emmène dans un écosystème intime de la création vivante en train de se faire. Avec Ouverture(s) vous entrez dans un atelier d’artistes en recherche et vous déambulez parmi eux suscitant par votre regard une nouvelle ampleur à cet environnement habituellement « obscène » (en dehors de la scène hein.).

Enfin, la Cie PAM est venue présentée Trauma, mon corps qui bat. Engagée dans la lutte contre les violences faites aux femmes, il s’agit là d’une véritable prise de parole par le corps à la croisée de différentes disciplines : psychothérapeutes, chorégraphes, danseurs, enseignants et étudiants à l’université en psychologie s’unissent pour sensibiliser et rendre visible cet invisible que sont les troubles du stress post-traumatique. Et si la transposition de cette cause dans l’art vivant était une solution pour étendre la prise de conscience à de plus vastes horizons ?

J’arrive au bout de mon débrief… Mais voilà, je souhaitais vous rassurer, le monde artistique du spectacle vivant n’est pas totalement à l’arrêt, bien au contraire, il fourmille ! Mars et son printemps promettent de jolies surprises teintées de nouvelles rencontres et de nouveaux passages pour nos cigales. C’est promis, on vous tient au courant ! « Eh bien, dansez maintenant ! »

(photo Une : Frida Khalo, ma réalité – Collectif La Machine © Kenny Briolotta)