Alexandre Tharaud : éblouissant !

Alexandre Tharaud : éblouissant !

Soirée lumineuse pour le public du Festival de Musique de Toulon et du Var, le 30 mai dernier au Palais Neptune, avec un pianiste éblouissant !

Alexandre Tharaud, heureux de revenir dans cette cité du bord de mer, « après cette période où rien ne se faisait et où tout recommence, mais doucement, car on ne sait si le virus a disparait vraiment ou s’il risque de revenir »… L’inquiétude domine dans le propos de l’artiste dont quelques concerts ont dû être annulés, car son binôme Jean-Guihen Queyras, blessé à l’épaule est dans l’incapacité de jouer à ses côtés, et d’offrir le programme prévu…

Seul en scène, il fut amplement et vivement ovationné après ses interprétations très personnelles, une gestuelle délicate, élégante, confidentielle, une façon très intimiste d’interpréter Rosamunde de Franz Schubert, dont il a lui-même fait la transcription, comme il a réalisé celle du Prélude de l’après-midi d’un faune de Claude Debussy, pour achever son époustouflant récital par la Sonate n°2 oups 35 Funèbre de Frédéric Chopin. Marche funèbre…

L’assistance séduite applaudit si vivement qu’Alexandre offrit plusieurs bis dont une œuvre de Scarlatti, et pour terminer enfin La liste de Schindler… Vraiment subjuguée, la foule ne cessait de l’applaudir même lorsqu’il avait déjà regagné sa loge.

Schindler… Souvenons-nous qu’Alexandre Tharaud, sollicité pour enregistrer de nombreuses musiques de film, interpréta également le rôle du pianiste Alexandre dans Amour, film de Michael Haneke, en 2012.

Il confia à Monique Dautemer, musicologue du Festival de Musique de Toulon, comment s’était déroulée « sa montée des marches au Festival de Cannes, aux côtés d’Isabelle Huppert ». Il montait simplement, ignorant la forêt de cameramen qui, devant eux, les gravissaient à reculons, avant de découvrir, en pénétrant dans la grande salle où il fut convié à prendre place, qu’il apparaissait au même instant sur grand écran…

Répondant au Palais Neptune aux ovations, Alexandre souligna particulièrement son regret de n’être pas accompagné du magnifique violoncelliste Jean-Guihen Queyras… Mais le public en oublia l’absent tant Alexandre Tharaud fut prodigieux. Comme un confident, il joua de son clavier, offrant une soirée absolument mémorable. « Il a interprété ses transcriptions, comme Liszt seul savait le faire, interpréta Chopin comme Chopin qui n’aimait pas les grands récitals, ni les grandes salles, ni un grand public, mais l’intimité des petits salons, et jouait avec des dynamiques différentes, du pianissimo au fortissimo, mais pas aussi fort que d’autres… car Chopin n’avait pas de forces… Et c’est très difficile de sortir des sons délicats. Ce que fit Alexandre Tharaud au Palais Neptune… Car, taper, tout le monde peut ! » Sa mère était danseuse à l’Opéra de Paris, puis professeur de danse. Et, commençant par la danse, Alexandre se souvint qu’il avait débuté en dansant Rosamunde de Schubert…

Ainsi a-t-il joué comme il dansait autrefois, ses bras offrant quelques arabesques il fit vivre le son comme s’il s’agissait d’un son orchestral : prodigieux !

photo : Alexandre Tharaud © Jean-Baptiste Millot