« Un tournant dans l’histoire de l’Opéra ! »

« Un tournant dans l’histoire de l’Opéra ! »

Vous vous demandez certainement ce que viennent faire ces propos tenus par Bertrand Rossi, Directeur de l’Opéra de Nice, en rubrique Muzik zak. Alors, sachez que la très vénérable maison azuréenne ouvrira sa saison 2022-2023 avec une soirée Metal Up The Opera ! Oui, oui, vous lisez bien ! Du bon gros son bien musclé retentira sous les ors de l’édifice inauguré en 1885 avec le mythique Aïda !

On le sait, le genre metal est fan de lyrisme, mais l’inverse est plutôt rare. Aussi la perspective de voir débarquer une horde de fous furieux dans ce temple de la Grande Musique a quelque chose d’extrêmement excitant. Mais au fond, est-ce si surprenant que cela ? Musiciens virtuoses, orchestres puissants, morceaux complexes et épiques, publics ultraspécialisés, l’univers du métal a parfois plus en commun avec la musique classique qu’avec le rock – qui, lui, présente pour principaux atouts son immédiateté et son minimalisme.

Après la sortie en 1970 de l’album éponyme de Black Sabbath, pour ce qui deviendra en quelque sorte l’acte de naissance du métal, de nombreux guitaristes cherchèrent par la suite à s’inspirer des structures de la musique classique dans leurs compositions, à commencer par Ritchie Blackmore (Deep Purple, Rainbow…). Et puisque l’on parle ici de musique, n’oublions pas le chant qui, comme dans l’opéra, suppose une grande si ce n’est parfaite maîtrise de son organe vocal pour acquérir la puissance et l’endurance nécessaire qui permettra de tenir sans broncher un concert de 2h, à coup de death growl…

Marina Viotti, soprano classique, finaliste du prestigieux Concours de Genève en 2016, qui a fait ses débuts dans le métal, explique bien que les métalleux affectionnent le grandiose, l’épique, les morceaux qui prennent le temps d’installer une ambiance, autant de notions que l’on retrouve dans la musique classique. Selon elle, la plupart d’entre eux connaissent des œuvres comme le Requiem de Verdi et sont particulièrement fans d’un certain Wagner, chez qui l’on remarque ce même intérêt pour la mythologie nordique. Le viking metal est d’ailleurs l’un des innombrables sous-genre du metal, qui entre (très nombreux) autres, comprend le metal symphonique ou le metal néo-classique.

Bien que certains artistes se réclament de la « grande famille » du genre classique, rappelons que de nombreux groupes nettement plus éloignés de ce courant, ont fait appel à des grands orchestres pour donner une autre dimension à leur musique. L’exemple sans doute le plus connu étant celui de Metallica, avec son mythique album live S&M, enregistré en 1999 avec l’Orchestre symphonique de San Francisco, sous la direction de Michael Kamen. Bref, si les metalleux sont grands amateurs de bière (environ 800 000 litres ont été consommés lors du dernier Hellfest!), de headbanging et de pogos, cela ne les empêche en rien d’être aussi de fin mélomanes !

« Nous sommes heureux de pouvoir commencer cette nouvelle saison par un festival de Métal ; le 3 septembre marque un tournant dans l’histoire de l’Opéra!« , nous a indiqué Bertrand Rossi, directeur de l’Opéra de Nice. L’idée d’organiser cette soirée est apparue « lorsque Heart Attack m’a contacté pour tourner un clip à l’Opéra (Wings of Judgement) pendant le confinement… J’ai adoré l’idée, alors nous avons pensé à créer un festival de Métal au sein même de l’Opéra réunissant plusieurs groupes ! Depuis plusieurs années, nous cherchons à nous renouveler, à innover, à être proches de toutes générations confondues, et cette ouverture de saison annonce notre volonté de toujours nous dépasser tout en cherchant l’excellence !« 

Question excellence, le public sera servi, puisqu’outre les Cannois de Heart Attack, nouveau fer de lance d’un trash metal à la française qui présentera son excellent 3e album Negative Sun, l’opéra accueillera le death mélodique des niçois de Unchained et les percussions des Tambours du Bronx. Ne vous fiez pas à leur patronyme, car ce sont bien des Français qui débarqueront avec leurs gros instruments, et si le groupe originaire de la Nièvre n’est pas un combo purement metal à l’origine, le virage pris en 2018 avec son opus Weapons of Mass Percussion ne laisse aucun doute sur sa « nouvelle » orientation. Il suffit de consulter le line-up, complété par des légendes du metal français comme Franky Costanza (Dagoba, Blazing War Machine) à la batterie, et le duo Stéphane Buriez (Loudblast) et Reuno (Lofofora) au chant !

« Je suis heureux d’accueillir dans cette salle un public qui se rapproche de celui de l’Opéra : respectueux des artistes, du lieu et un public qui aime par-dessus tout la musique (et la bière, mais ça je l’ai déjà dit…) ! C’est pour cela que j’avais envie d’en faire un évènement« , conclut Bertrand Rossi.

3 sep 20h, Opéra de Nice. Rens: opera-nice.org & imagoproduction.com

photo : Heart Attack © Manuel Acqualeni